vendredi 17 décembre 2010

λύω, λύσω, ἔλυσα, λέλυκα, λέλυμαι, ἐλύθην

J'aime énormément le Wiktionnaire. J'ai tendance à penser qu'il s'agit du projet wikipédien avec le plus de potentiel. Enfin, quand on maîtrise la syntaxe, bien sûr. Grâce à lui, j'ai écrit sur de l'indo-européen, du sumérien et j'en passe.

Une idée géniale du projet, c'est qu'il est possible de créer des articles individuels pour chacun des formes d'un mot (pluriels, féminins, conjugaisons, etc.). Il n'y a pas longtemps, je me suis dit que si j'avais eu ça pendant que j'apprenais le grec ancien, j'aurais apprécié. (oui, j'ai étudié le grec ancien dans ma prime jeunesse. J'ai même pris l'option au bac — avec l'option informatique, une combinaison inédite dans mon académie cette année là — et l'examinateur était tellement content de voir des matheux apprendre la langue qu'il nous a laissé choisir notre texte, et bref. Enfin, j'ai bien aimé, moi.)

C'est que les conjugaisons en grec ancien, ça peut être retors. Déjà, y'a des modes bizarres comme l'optatif, des temps étranges comme l'aoriste, des voix inhabituelles comme la voix moyenne, deux personnes au duel, etc. En gros, il faut considérer le radical du verbe, placer derrière un signe pour le temps, placer devant un dédoublement si c'est au passé, placer encore devant un augment si c'est un temps secondaire et flanquer une désinence pour la personne tout au bout. Et faut tenir compte des éventuelles modifications phonétiques, de radicaux qui peuvent changer en cours de route, et toutes ces sortes de choses.

Tenez, prenez par exemple le verbe λύω, « délier » (l'exemple de base puisque son radical λύ est totalement régulier et ne forme pas de modifications phonétiques zarbies). Son plus-que-parfait de l'indicatif médio-passif à la 1re personne du pluriel devient ἐλελύμεθα. Facile. Si ça vous amuse, vous pouvez jeter un coup d'œil sur le chouette tableau de conjugaison du verbe. Et dites-vous bien que c'est un verbe simple.

Maintenant, je ne sais pas si vous l'avez remarqué, mais un simple verbe contient facilement 300 formes différentes. Donc 300 articles potentiels sur le Wiktionnaire. Si avec ça on n'explose pas les anglais, c'est à se flinguer. :)

Bon, spas tout ça, mais va falloir déjà que je les ponde, les conjugaisons. Déjà, je suis sûr que l'aoriste indicatif passif de βάλλω (« lancer ») n'est pas ἐβάλην comme indiqué ici, mais ἐβλήθην. Y'a du boulot.

jeudi 9 décembre 2010

Visibilité

Je suppose que tout le monde est au courant du foin fait autour de WikiLeaks récemment. Globalement, si j'ai bien pigé, l'idée générale, ça semble être qu'on savait déjà tout ça et que c'était donc bien la preuve qu'il ne fallait rien publier. En laissant de côté l'illogisme de cette opinion, on peut bien se dire que si Assange s'était borné à faire un boulot standard de journaliste (publier n'importe quoi sans penser à la santé ou à la vie de quiconque, mais le faire sur du papier, en gros), on aurait plutôt applaudi. J'imagine que le problème, c'est l'échelle du bidule : des centaines de milliers de documents accessible facilement.

C'est marrant, mais on m'a fait penser ce matin à des affaires qui sont arrivées à Wikipédia. Des affaires un tantinet similaires (légales, celles-là ; quoiqu'à l'heure actuelle, rien n'ait encore été prononcé sur la légalité des fuites de WikiLeaks).

En mars 2009, le Monde constate la publication de l'organigramme de la DCRI sur l'article correspondant de WP. Le Bistro remarque rapidement que, si cet organigramme est couvert par le secret-défense, toutes les infos sont accessibles simplement en regardant le Journal officiel. Donc parfaitement libres. Wikipédia se contente juste d'en accroitre la visibilité.

En juillet 2009, on apprend que Wikipédia reproduit les 10 plaques originales du test de Rorschach avec les réponses standard. Bien sûr, les plaques sont dans le domaine public. Bien sûr, ces réponses sont données un peu partout. Là encore, Wikipédia en accroit la visibilité. D'où colère de certains psychiatres.

En août 2010, c'est la conclusion de La Souricière qui fait débat. La pièce de Christie repose sur l'idée qu'on ne doit pas dévoiler qui est l'assassin (à mon avis, le succès de la pièce tient surtout à ce sentiment qu'on doit avoir après sa représentation de faire partie d'une communauté restreinte, responsable et au courant). Forcément, WP dit précisément qui est l'assassin. Peu importe qu'il soit parfaitement possible, muni d'un simple Google, de le trouver sans même passer par l'encyclopédie : Wikipédia donne là encore trop de visibilité au sujet.

Je suppose qu'avant, on pouvait se permettre de laisser libre l'accès à toutes ces informations, puisqu'il était impossible de les publier (c'était possible mais trop coûteux, pas facile, pas assez lu, etc.). Bref, on avait le droit, sauf qu'en pratique on n'avait pas le droit. Maintenant, il est facile d'user de ce droit. Et, comme de juste, ça répond « mais avant c'était pas comme ça, on rompt avec la tradition. » Ouaip, tant que vous aviez des droits inutiles, ça allait... Attendez-vous, sous le fallacieux prétexte de la moralité, à ce qu'on vous les rabiote.

mardi 2 novembre 2010

Textualité

On prétend parfois que nous vivons dans une société de l'image, ce qui m'a toujours semblé douteux. J'ai plutôt l'impression d'une société du texte, lequel est parfois illustré par l'image. Les journaux télé, par exemple, me font l'effet de journaux radio avec des illustrations dessus : les capacités du médium semblent inutilisées, comme si on ne savait pas quoi faire de tout cet écran et qu'on se contentait de plaquer des trucs qui bougent sur les paroles prononcées. De même, je suis surpris quand on ne parle du cinéma que comme d'un théâtre filmé, où le jeu des acteurs et le scénario représentent tout, tandis que la mise en scène et le montage ne sont qu'un gadget (ou, pire, un effet, comme si une telle chose ne pouvait pas être sérieuse). Certes, ce que je raconte n'a rien de bien nouveau, j'en ai conscience.

Wikipédia est un site textuel. Il l'est à cause des contraintes techniques inhérentes au wiki. Il l'est également car l'image d’Épinal de l'encyclopédie suppose de la rédiger avec des mots. Il l'est encore, à mon avis, car Wikipédia est un rejeton des premiers temps du web, où les sites étaient décrits par le texte. Pour toutes ces raisons, le son, l'image, la vidéo, l'animation, la musique, les diagrammes, les graphes, les courbes, les schémas, les partitions, tous ne sont que des illustrations : un article n'est jamais bâti autour d'eux.

Pourtant, il est possible de faire passer un réel message encyclopédique en dehors du texte pur, comme l'exemple de la carte figurative de Minard le montre. Mais je suis coupable. De ce chef d'œuvre de représentation synthétique, j'ai pondu un infâme résumé textuel. On n'y échappe pas.

mardi 26 octobre 2010

Administrateur, ou pourquoi ne pas se présenter

L'ami Pierrot vient de compiler certains arguments contre des derniers mois lors des élections au poste d'administrateur et ça vaut son pesant de cacahuète. Il semble que désormais, pour se faire élire, il faille débuter sur Wikipédia avec la mentalité d'un homme politique dont le but est de se faire élire. Bref, c'est délirant (mais fun).

On m'a souvent demandé pourquoi je ne me suis jamais présenté comme admin. La réponse est simple : vu ma façon de jouer à Wikipédia, je n'ai aucun besoin des outils liés à cette fonction. Par conséquent, je n'ai jamais eu envie de déranger le site avec une candidature.

Parfois cependant, j'ai caressé l'idée de présenter une candidature bidon, juste pour voir. Je ne suis pas passé à l'acte car la blague ne serait pas appréciée à sa juste valeur (comprendre qu'on m'en voudrait d'avoir fichu le souk ; le processus semble être pris bien trop au sérieux). Mais si je me présentais, j'aurais tout un tas de votes contre, et certains seraient probablement très insultants. Ce n'est pas très grave, parce que j'ai accumulé au fil des ans tout un tas d'inimitiés (j'avoue ne pas en comprendre la plupart, mais ça ne me gène pas plus que ça).

En réalité, ce qui m'empêche de me présenter au poste d'administrateur, ce sont les éventuels votes contre de personnes qui comptent pour moi. Là, oui, ça me ferait du mal. Parfois, il vaut mieux rester ignorant.

lundi 25 octobre 2010

Singavi

Wikipédia possède une liste des pays par point culminant. Malgré son titre, elle ne se limite pas aux simples pays mais inclut également différents territoires, en particulier les différentes possessions françaises d'outre-mer. L'intérêt d'une telle liste est bien sûr limité, mais tout ne peut pas posséder la gravité et l'importance d'un Vrai Sujet Encyclopédique de Fond, et l'anecdotique n'est pas à bannir de nos vies. Toutefois, il convient de le faire proprement.

En face de l'entrée Wallis-et-Futuna, le tableau indique : mont Singavi, 765 m. Par curiosité, je suis allé vérifier sur le Géoportail ; Wallis-et-Futuna étant une communauté d'outre-mer française, l'IGN en publie des cartes en ligne. Sur celles-ci, le site est formel : le point culminant de l'archipel se situe sur l'île de Futuna et il s'agit du mont Puke, par environ 520 m. Non seulement ce n'est pas le même nom, mais 30% d'écart pour l'altitude, ce n'est pas négligeable. J'aurais quand même tendance à faire confiance à l'IGN. D'où vient ce mont Singavi ?

La liste française est une traduction de son équivalent anglais, sur lequel le mon Singavi possède un article dédié. Une brève recherche permet de faire remonter l'origine de la liste anglaise au World Factbook de la CIA, une compilation de statistiques diverses sur les pays du monde fournie gracieusement par le renseignement américain. Intéressante, mais toujours à prendre avec des pincettes... La question, maintenant : d'où la CIA sort-elle ce mont Singavi ? Il existe bien sur Futuna le royaume de Sigave. Est-ce lié ? Mystère...

J'ignore quelle est la morale de cette histoire, si ce n'est qu'il faut se méfier même des sources les plus officielles. Je ne me fais pas trop de souci quant à l'altitude réelle du mont Puke car j'ai plutôt confiance en l'IGN. Toutefois, ça jette le doute sur le reste des entrées. Et tout ça pour quelque chose d'aussi simple et courant que les points culminants des pays...

vendredi 8 octobre 2010

Spomenik

En ce moment, j'ai pas mal de boulot. Toutefois, afin de me distraire entre deux livraisons logicielles bugguées, j'ébauche les différents hôtels particuliers de la place des Vosges. Et quand j'en ai marre des hôtels particuliers du 17e siècle, je cherche autre chose.

Hier, j'ai vu passer dans mon fil Twitter un lien vers ça. Ca, c'est la brève présentation d'une série photographique de Jan Kempenaers sur des monuments yougoslaves des années 1950 à 1970. Des bidules monumentaux en béton brut. Du futurisme. Du brutalisme. À la limite de la science-fiction.

Forcément, ça m'a plu et j'ai essayé d'en savoir plus. En cherchant un peu, on trouve les noms des auteurs et l'emplacement des oeuvres (par exemple, ; oui, c'est en croate). D'où l'action suivante : créer les articles correspondants sur Wikipédia. Pour l'instant, j'en ai ébauché à gros traits trois : le Makedonium à Kruševo en Macédoine, le mémorial du camp de Jasenovac en Croatie et le monument à la Révolution de Podgarić, également en Croatie. De façon intéressante, il est possible de relier ces articles au reste de Wikipédia (en plaçant des images, en créant des wikiliens, avec des interwikis, etc.), signe que le projet commence à avoir une bonne couverture générale. Après, je ne parle pas de langue slave, donc c'est assez difficile de mettre un peu de chair sur mes squelettes d'articles. Espérons que ça donne des idées à certains.

Même après un million d'articles, il reste encore des sujets à creuser.

jeudi 23 septembre 2010

Prochaine étape : 220 !

Donc, le million.

Ce fut un peu longuet, mais on va finir par y arriver, à la millionième fiche sur la Wikipédia en français. Bien sûr, ça aura mis quatre ans de plus que sur en:, mais le résultat est là.

Maintenant, deux choses vont se passer.

La première : le millionième article ne sera pas assez bien. Pas digne d'une encyclopédie. Pas digne d'un projet culturel. Probablement ni fait, ni à faire. En plus, ça sera probablement une sale ébauche pourrie. (Pour info, le millionième sur en: était une gare. Même pas une gare connue, une simple gare de banlieue en Écosse. Et l'article initial était une sale ébauche.)

La seconde : désormais, le projet sera terminé, il n'y aura plus aucun sujet, on aura tout fini, tout éclusé, tout écrit et il faudra se concentrer sur l'existant. Faire passer le nombre d'AdQ de minuscule à risible, par exemple. Ou bien virer toutes ces fiches sans intérêt qui dénaturent le projet. Revenir au fondamentaux, quoi. (Évidemment, en: possède deux fr: et demi d'articles en plus, mais c'est pas vraiment des articles, donc ça compte pas.)

Bref, vous l'avez compris, le passage à sept chiffres va être l'occasion rêvée pour tous les pleureurs de pleurer encore plus. Alors, bien sûr, on pourrait se dire que c'est un putain de projet génial avec lequel on s'amuse trop bien, qu'on a foutu la pile à tous les détracteurs, que ça marche du feu de Dieu et qu'en plus on n'a toujours pas atteint les limites du bidule, mais ce serait probablement trop optimiste. Et l'optimisme, tout le monde vous le dira, c'est pour les abrutis, car tout est toujours perdu d'avance et si ce n'est pas parfait dès le début, ça ne sert à rien d'essayer.

Personnellement, je n'irai pas bouder mon plaisir. Je suis content que ce projet, dans lequel je me suis quand même investi depuis plus de six ans, continue à progresser.

Allez, puisqu'on y est, voici un de ces articles improbables qu'on ne peut trouver que sur Wikipédia : la boulangerie-patisserie Beaumarchais. Oui, c'est une simple boulangerie parisienne. Mais elle est inscrite aux monuments historiques. Pour en arriver à la création de l'article, il a fallu qu'un projet se monte, qu'on tâtonne pour trouver comment écrire sur des sujets de ce genre, qu'on se rende compte qu'on peut pondre des articles comme ça, que quelqu'un prenne une photo, éprouve l'envie d'en parler et se mette derrière son clavier. Une logistique complexe. Certes, ce n'est probablement pas l'article le plus important du monde : et alors ?

jeudi 2 septembre 2010

Fight the Powah![who?]

J'étais en train de lire un texte d'OWNI sur l'absence des intellos français sur Internet (enfin, plus exactement, leur refus d'être présent sur Internet). Bon, OK, mais qui se préoccupe encore des intellectuels français parisiens germano-pratins (j'ai plus d'adjectif pertinent, Saint-Germain-des-Près est redevenu un quartier ordinaire de Paris depuis des décennies) ?

J'imagine que ça doit être assez difficile à concevoir pour certains de mes lecteurs, mais je vis dans un monde totalement désintellectualisé, d'où les institutions sont absentes. Ici, l'État est une abstraction se réduisant à ses interfaces administratives, les gouvernements ont autant impact que si je vivais au bord du désert des Tartares et les discours tenus par les personnes autorisées me parlent autant que ceux des Tubular Brainers dans l'Arche de Captain Blood[1].

Dans un texte cité par le billet d'OWNI, j'ai trouvé la citation suivante, que je trouve assez descriptive : « La culture numérique est née d’ingénieurs surdoués mais plutôt rustauds (accessoirement : n'ayant pas lu La Princesse de Clèves, ils sont l'incarnation parfaite de cette middle class méprisée par nos intellectuels). »

Je me suis déjà exprimé il y a quelques mois sur ma propre rusticité et ma propre condition de fils de middle class sans passé ni culture. Il se trouve que je n'ai pas lu La Princesse de Clèves (par pur hasard, j'ai lu d'autres bouquins ; et puis ma grande sœur m'avait dit que c'était super chiant) et que j'ai un diplôme d'ingénieur (qui ne m'a d'ailleurs jamais vraiment servi). J'ai grandi dans des classes de fils et filles d'enseignants intégralement dédiés à l'entrée dans des Grandes Écoles. Probable que mon comportement adulte est une réaction au sentiment d'aliénation que je n'ai pas manqué d'éprouver à l'adolescence.

Toujours est-il que le discours intellectuel français standard me passe complètement au-dessus de la tête. Certes, il m'agace un peu (qui ne serait pas agacé quand on lui fait comprendre qu'il doit faire partie d'une culture tout en sachant qu'il en sera éternellement exclu ?[2]), mais il est quand même bien bénin. Je sais bien que la Vraie Vie n'est pas là. Que quand la France disparaitra complètement de la pensée mondiale[3], ça ne sera pas bien important, que la France fut juste un pion brièvement promu comme reine avant d'être retiré de l'échiquier. Tout ceci ne changera rien pour moi, ni pour les dizaines de millions de mes concitoyens.

La seule chose que je sais, c'est que tout le monde aime votre culture, mais que personne n'ira jamais la défendre à votre place. Ce n'est même pas une question de protection, d'exception culturelle, d'impérialisme ou n'importe quoi. Bref, l'hystérie anti-Internet, ce n'est pas seulement à côté de la plaque, c'est également le meilleur moyen pour disparaitre totalement. Peut-être est-ce l'objectif ? Le désir de mort n'est pas quelque chose d'abstrait.

De mon côté, Wikipédia, c'est un peu ma façon de faire vivre ma culture à moi (une culture hétéroclite, qui contient même de vrais morceaux de Grande Culture). Ce n'est pas la seule, mais c'est le sujet de mon blog, donc je ne parlerai que de ça. Ça me procure également le sentiment gratifiant de m'opposer à l'establishment sans avoir à lancer de pavés. L'affreuse vérité, c'est que je ne me soucie pas de promouvoir la Culture ou la Mémoire ou je ne sais quel autre grand mot avec une majuscule au début. Si je fight the powah, c'est un sous-produit, une conséquence annexe, un cadeau bonus, un truc cool en plus.

Malgré tout ça, malgré mon passé, malgré mes origines, malgré mon environnement, je n'ai aucune justification particulière pour contribuer à Wikipédia, mis à part que c'est fun. Il parait que c'est mal et que c'est un exemple de plus de la démission politique des personnes de mon âge. Euh, certes, et alors ?

C'était un billet de blog complètement décousu, écrit sur une dizaine d'heures au milieu de plein d'autres choses. La seule chose que je voulais dire, c'est : je n'intellectualise pas Wikipédia. Voilà.


  1. Félicitations à ceux qui pigent la référence.
  2. Et je suis très très loin d'être le plus exclu dans l'histoire.
  3. En supposant que ce n'est pas déjà le cas, bien sûr.

mardi 31 août 2010

Le point de vue officiel n'est jamais qu'un point de vue

Dans l'épisode précédent, je vous parlais en coup de vent de tout le mal que je pense du terme « officiel ». Comme je n'ai rien d'intelligent à dire, autant partir là dessus pour alimenter mon blog.

Officiel, -elle, adj. et subst. : qui émane du gouvernement ou d'une autorité administrative reconnue

Dissipons d'emblée un malentendu. Malgré mon anarchisme bas-du-front chronique et mon mépris moqueur pour l'autorité et les administrations, je reconnais qu'il est parfois utile d'avoir des normes ayant valeur légale, histoire qu'on soit capable de se comprendre, nous tous, la Société des gens qui vivent les uns avec les autres. Néanmoins, ça s'arrête là. En particulier, j'évite d'utiliser ce terme comme synonyme de « vrai ».

Sur Wikipédia, on a un bidule appelé « neutralité de point de vue » que personne ne comprend jamais. L'idée, c'est de mentionner tous les points de vue pertinents. En pratique, c'est totalement contre-intuitif (le cerveau humain doit être câblé ainsi). Pour compenser, j'imagine qu'on essaye toujours de rendre un point de vue supérieur en le qualifiant de « vrai », parce que si c'est vrai, les autres points de vue sont faux et ne doivent pas être mentionnés (une tactique absurde quand on regarde le concept de NPOV, mais globalement ça marche). Et quoi de mieux que le point de vue officiel de l'instance supérieure pour renvoyer tous les contradicteurs dans les cordes ?

Je soupçonne que derrière cette recherche de l'officiel, se cachent un vrai désir d'autorité et une vraie peur du vide. L'autorité pour être certain que quelqu'un vous confirme que ce qu'on vous raconte est juste (ou, à l'inverse, que vous puissiez affirmer qu'on vous ment), la peur du vide pour éviter de se dire qu'il pourrait ne pas y avoir de réponse définitive. Dans les deux cas, ça part du principe qu'il existerait quelque part un endroit où seraient rangées la totalité des vraies versions de tout. Malgré tout ce qu'on essaye de vous faire croire, ce n'est pas correct.

Wikipédia n'est ni une administration, ni un service d'enregistrement des décisions de l'État. Le point de vue officiel est probablement pertinent, mais il est rare qu'il soit le seul. Arrêtons un peu de balancer de l'officiel n'importe comment.

mardi 24 août 2010

Point zéro

Le truc formidable, avec Wikipédia, c'est qu'on finit par placer des {{refnec}} partout dans sa tête. Parfois on a envie d'en placer également sur Wikipédia, ce qui est moins formidable quand même.

Il existe un médaillon[1] incrusté devant Notre-Dame de Paris, sobrement intitulé « point zéro des routes de France ». Tout Vrai Français sait que c'est à partir de ce point qu'on mesure la distance routière en France. D'ailleurs, l'article nous le dit : il s'agit du « point de départ officiel des routes au départ de Paris ». C'est officiel, donc c'est forcément Vrai[2].

Problème : y'a aucune source. Un peu plus haut, on nous apprend que la borne aurait été installée le 10 octobre 1924. Ou le 22 janvier, on sait pas trop. Et qu'avant, tout le monde aurait discutaillé pendant 12 ans pour savoir s'il fallait matérialiser ce point...

Bref : ce que ce point représente exactement, on n'en a visiblement aucune idée. Pourquoi cet endroit ? Jusqu'où servait-il de référence ? D'ailleurs, on prenait quoi comme référence avant l'installation de la borne ? Et ça date de quand, ces mesures ? Et ça veut dire quoi, « point de départ officiel » ? Refnec, comme on dit chez nous...


  1. Un jour, il faudra que je crée la liste des médaillons incrustés dans le sol de Paris : il y en a des tas...
  2. Je compte écrire un jour un billet sur l'urticaire géant que provoque chez moi la vision du mot « officiel » sur Wikipédia.

lundi 23 août 2010

Considérations culturelles

C'est une anecdote que j'ai lue dans L'Usage du monde, l'indispensable récit de dérive de Nicolas Bouvier. Bouvier et Vernet arrivent quelque part du côté de la Perse (je ne me souviens plus du pays, mais c'était dans ce coin là, à 3 000 bornes près). Là, dans un trou paumé, ils tombent sur une p'tite localité où une ONG américaine dépose de quoi construire une école. Problème de culture : les Américains pensent que les locaux vont bâtir l'école. Les locaux ne font que prendre le matos pour leurs constructions personnelles. Les deux approches sont aussi valables l'une que l'autre. Elles pourraient tout aussi bien réussir qu'échouer. Juste deux conceptions différentes de la vie. Incompréhension.

Il est de bon goût, dans nos contrées, de dénier aux Américains une culture commune (certains Américains eux-même le nient ; j'imagine qu'on a déjà vu des poissons niant l'existence de l'eau). Certes, c'est un grand pays assez peu homogène, mais certaines tendances se retrouvent un peu partout. Si on veut schématiser de façon caricaturale, l'Américain croit à l'initiative individuelle et estime que chacun apporte sa propre contribution à la Société. L'idée : les choses bougent parce qu'on décide de les bouger soi-même, sans attendre les autres. Une sorte d'optimisme fondamental, qu'on pourrait prendre à tort pour de la naïveté, une façon de ne compter que sur soi-même, assimilée souvent à de l'égoïsme. Il est toujours difficile d'appréhender une culture différente à travers ses propres yeux.

Tout ça, j'imagine que vous le savez tous (après tout, dans sa version formatée, le slogan de Nike ne dit rien d'autre : s'il parle directement à tout Américain, il demeure intraduisible pour les autres). Bien sûr, tout cela n'exclut pas la naïveté, l'égoïsme, la méchanceté ou la connerie pure et simple, mais c'est la même chose pour tout le monde. J'essaye juste de définir un état d'esprit. Nous n'entrerons pas sur les terres glissantes : cet état d'esprit est-il ce qui permet aux States de réussir ? D'ailleurs, réussissent-ils vraiment ? Je n'en sais rien (et j'en m'en tape).

Peut-on comprendre l'approche wikipédienne si on néglige cet aspect culturel ? Wikipédia, c'est chacun qui vient apporter ce qu'il estime être le mieux, de sa propre initiative, sans en référer à personne avant. Tout est fondé sur une foi indécrottable en "ça va marcher, suffit qu'on s'y mette". Il s'agit probablement de l'un des projets les plus authentiquement américains, le genre de truc qui n'aurait jamais pu être mené à bien ailleurs, parce qu'ailleurs, on ne peut pas, on ne veut pas, on n'y croit pas ou on n'y pense même pas.

Le problème de tout ça : est-ce que Wikipédia peut sérieusement fonctionner en dehors des USA ? Pas évident, à mon avis.

mardi 17 août 2010

3D isométrique et géolocalisation

Je suis un grand fan de la géolocalisation sur Wikipédia, ce n'est plus un mystère. J'ai trouvé une nouvelle façon d'apprécier la chose. Certes, elle n'est pas nouvelle et certains d'entre vous l'ont déjà remarquée, mais je vous la file quand même.

Comme vous le savez déjà (ou pas), Bing Maps, le concurrent de Google Maps, a une fonctionnalité sympatoche : au-dessus de certains lieux urbains, il est possible de sélectionner « Satellite », puis « Aérien » pour obtenir une vision du coin en 3D isométrique. C'est fun et pratique à fois : on perçoit bien mieux les élévations de cette façon qu'avec une simple vue aérienne.

Maintenant, prenez un article ou une catégorie qui contient des éléments géolocalisés suffisamment proches, dans un endroit couvert par cette projection. Par exemple, les églises de Venise. Placez le modèle {{KML}} dessus (qui extrait les coordonnées des articles et crée un beau fichier KML en sortie) et donnez le tout à manger à Bing Maps. Basculez en 3D isométrique et admirez le paysage. Sur l'exemple des églises de Venise, vous pouvez visualiser chacune d'elle dans son contexte. Et je dois dire que le résultat déchire grave sa race.

lundi 16 août 2010

Éditer sans n'avoir rien à dire

— Poulpi-kun, poulpi-kun, comment fais-tu pour que tes ébauches ressemblent à autre chose qu'une simple ligne sous le titre de l'article ?
— C'est un secret de fabrication.
— nyoro~n...

Malgré mes airs bourrus, je dois admettre que Churuya-san[1] a raison, en creux : Trop souvent, les ébauches de Wikipédia incitent plus à la rigolade entre potes qu'à prendre son clavier pour les étoffer. Aujourd'hui, à la demande générale[2], je vais donc vous expliquer comment créer une ébauche qui tient la route quand on n'a rien de particulier à dire sur le sujet.


Dix claimeurs : ce billet de blog parle d'ébauches et de création d'ébauches. Sa lecture peut donc être difficilement supportable par les contributeurs ordinaires.

Grand 1, petit a : pourquoi faire des ébauches ?


Voici le genre de question auquel je serais tenté de répondre : « pourquoi pas ? » mais je sais que pas mal d'entre vous considèrent étrangement que ce n'est pas parce qu'on a le droit de faire quelque chose qu'on a le droit de le faire[3]. Je vais donc tenter d'être un poil peu plus explicite.

L'idée derrière les ébauches, c'est que Wikipédia est un wiki : si le sujet a du potentiel, il y aura bien quelqu'un pour l'améliorer. Depuis le début du projet, les ébauches ont mauvaise presse. En général, on leur reproche de ne pas être des articles à part entière, ce qui me semble être un argument complètement à côté de la plaque. Un autre argument consiste à affirmer que les ébauches viennent manger le pain des Vrais Articles. Celui-ci me semble parfaitement fallacieux : jusqu'à présent, rien ne montre que créer une ébauche empêche un autre sujet d'être amélioré. Certes, rien ne montre non plus que ce n'est pas le cas, mais vu l'historique de Wikipédia, on peut penser qu'abondance d'ébauches ne nuit pas.

Bref, si les ébauches ne nuisent en rien au projet, il n'y a réellement pas d'autre réponse à cette question que « pourquoi pas ? » Wikipédia, après tout, est basée sur l'esprit d'initiative et la prise en main personnelle : on y joue comme on le désire.

Grand a, petit 1 : ok, j'ai pigé, mais j'en fais quoi, de mon ébauche, maintenant ?


Tout ceci, c'est bien amusant, mais votre ébauche, vous avez envie que quelqu'un l'édite derrière vous[4]. En général, on cite l'effet piranha pour défendre le processus, ou alors le fait qu'une pomme est un fruit, en oubliant de mentionner qu'ébauche ou pas ébauche, « pomme » aurait été édité quoi qu'il arrive. Si le sujet est évident, votre ébauche sera éditée. S'il l'est moins, autant donner envie qu'on le fasse.

Vous avez donc un sujet pas bien porteur. Il vous faut :
  1. placer tout le baratin technique ennuyeux propre à Wikipédia ;
  2. indiquer clairement où ajouter les infos.

Petit a, grand 1 : créer une ébauche sympa avec trois bâtons et un bout de ficelle


Voici une méthode que j'utilise pour créer une ébauche potable :
  • Placer les composants :
    • bandeau d'ébauche[5] ;
    • infobox, si possible
    • phrase d'introduction
    • un ou deux paragraphes
    • paragraphe « Annexes », avec ses liens internes et externes
    • bandeau de portail
    • catégories
  • La phrase d'introduction doit être courte et centrer immédiatement le sujet. Évitez les circonvolutions. Ne citez pas l'accessoire, ça ferait perdre du contenu pour le reste.
  • Tentez de remplir l'infobox au maximum. Si elle ne fait que deux lignes, virez la.
  • Débrouillez-vous pour caser au moins un paragraphe. Au pire, utilisez « Description ». N'ayez pas peur de décrire, même si vous ne devez écrire qu'une seule ligne. Par exemple, si vous parlez d'une église, décrivez son architecture générale. Ce n'est pas du TI, mais restez strictement sur les rails de la description pure et dure. N'interprétez rien. N'utilisez aucun terme même très vaguement appréciatif.
  • Liez l'article à tout ce que vous pouvez[6] : plus il sera accessible, meilleures seront les chances de tomber dessus.
  • N'hésitez pas à créer des catégories pour faire sortir l'article de son anonymat.


Si vous vous débrouillez bien, vous devez obtenir un article d'une longueur potable, encore allongé par l'apparition d'un sommaire. Tenez, voici ce que j'ai fait sur l'église Notre-Dame-des-Ardilliers de Miquelon, un édifice que je ne connais ni d'Ève, ni d'Adam : la rédaction m'a coûté cinq minutes à tout casser.

Grand z, petit 30 : et maintenant ?


Ne vous leurrez pas : au fond, votre article ne contient pas plus d'informations que si vous aviez juste écrit que la pomme était un fruit. La seule différence, c'est que vous avez placé des gros panneaux « Éditez ici ».

Notes :


  1. Ça me fait penser qu'on n'a même pas d'ébauche pour Nyorōn Churuya-san...

  2. Celle de Trizek, je crois bien.

  3. Il semble qu'il y ait des considérations morales en jeu afin de déterminer ce qui doit être fait et ce qui ne doit pas l'être. Enfin, on m'a dit que ce n'était pas de la morale, juste une évidence, mais on ne me la fait pas, à moi.

  4. Je pars du principe que vous n'êtes pas opposé à l'édition de votre ébauche, ce qui me semble une position pleine de sens.

  5. Ça tombe sous le sens, mais c'est toujours mieux de le rappeler.

  6. Évitez le spam, quand même : c'est mal perçu.

mardi 10 août 2010

Edit Walk

xkcd a codifié le concept de wiki walk : vous cherchez un sujet intelligent sur Wikipédia et vous finissez avec vingt onglets ouverts, portant sur des trucs complètement frivoles.

Dans mon cas, je ne fais pas que consulter. J'édite aussi. Parfois, mes éditions ont une origine totalement aléatoire.

Dimanche soir, j'étais à la recherche d'un machin à faire afin de repousser le moment d'aller me coucher. Je suis allé consulter la base Palissy, ce grand recueil français du tout et n'importe quoi vaguement patrimonial. J'ouvre donc le formulaire de recherche et, mû par une inspiration subite, je me demande combien qu'elle a de cadrans solaires dans le ventre, la base (après tout, y'a toujours la liste des cadrans solaires de Paris à compléter). Je rentre donc « cadran » dans le champ « type d'objet » et je clique sur le lexique, parce que la base Palissy, on sait jamais dans quoi les bidules sont rangés. Une collection de termes divers m'arrive dans la figure (« cache-radiateur », « cadenas de table », « cadre à grelots », etc.). « Cadran solaire » est dans le lot. Cool.

Ah oui, mais.

Juste au-dessus, je tombe sur le terme « cadran lunaire ».

Tiens, c'est quoi, ça ?

Une seule réponse sur la base : un cadran lunaire sur une maison de Varennes-sur-Loire. Pas plus d'explication que la simple existence du bouzin. Je tape le terme dans Google, n'obtient aucune réponse vraiment satisfaisante, passe à l'anglais moondial, tombe sur une série télévisée décrite sur la WP anglophone. La présence de parenthèses m'incite à penser qu'il y a de l'homonymie dans l'air. Indeed, il existe un article « Moondial ».

Donc, un cadran lunaire, c'est comme un cadran solaire, mais avec la Lune. En gros, ça ne marche qu'autour de la pleine Lune et il faut introduire une tonne de corrections pour tenir compte du mouvement apparent de l'astre. La photo du début d'article, c'est un cadran lunaire de 1733, peint sur un mur du Queen's College à Cambridge. Je n'ai aucune idée de comment ça marche, y'a des lignes partout et un tableau correctif pour l'intégralité d'une lunaison, c'est-à-dire même quand la Lune est nouvelle, ce qui est totalement absurde. Bref, les cadrans lunaires, ça semble überg33k. Je crée donc « cadran lunaire » sur fr:.

Et là, je me dis : « Poulpy, mon ami, un bitonio pseudo-scientifique datant du XVIIIe siècle, tu ne crois pas qu'on peut en trouver trace ailleurs ? » Comme je sais que j'ai parfaitement raison, j'ouvre le Trévoux sur Wikisource et recherche l'entrée « Cadran ». J'obtiens :

 « Cadran lunaire, ou à la lune, celui qui indique l’heure de la nuit par le moyen de la lumière de la lune. »

Mon intuition est bonne, mais je reste sur ma faim. Il me faut des munitions plus grosses. Du capilotractage de compèt'. Des types capables de disserter sur rien du tout pendant des pages et des pages. J'ouvre donc l'Encyclopédie à « Cadran solaire ». Je ne suis pas déçu.

 « Tracer un cadran lunaire. Supposons, par exemple, que l’on demande un cadran lunaire horisontal : décrivez d’abord un cadran solaire horisontal : élevez ensuite les deux perpendiculaires A B & C D, (fig. 19.) à la ligne de douze heures ; & divisant l’intervalle G F en douze parties égales, par les différens points de division, tirez des lignes paralleles. Maintenant si on destine la premiere ligne C D au jour de la nouvelle lune, & la seconde au jour où la lune arrive au méridien, une heure plus tard que le soleil ; & enfin la derniere ligne A B au jour de la pleine lune : les intersections de ces lignes avec les lignes horaires donneront des points, par lesquels on tracera une ligne courbe 12 12, qui sera la ligne méridienne de la lune ; on déterminera ensuite de la même maniere les autres lignes horaires, 11, 22, 33, &c. lesquelles seront coupées aux heures solaires correspondantes & respectives, ou par l’ombre de la lune, que jettera le style du cadran. On effacera les lignes horaires du cadran solaire, aussi bien que les perpendiculaires, par où l’on a tiré les heures lunaires ; & on divisera l’intervalle G F par d’autres lignes paralleles en quinze parties égales, qui répondent aux quinze jours entre la nouvelle & la pleine lune. Enfin on écrira auprès de ces lignes les différens jours de l’âge de la lune. »

 « Maintenant, connoissant par un calendrier l’âge de la lune, l’intersection de la ligne de l’âge de la lune, avec les lignes horaires de la lune, donnera l’heure de la nuit. »

Tout de suite, c'est plus clair ! Enfin, une clarté de pleine Lune, bien sûr.



Quelle est la morale de cette histoire ?
  • Au XVIIIe on n'avait pas ThinkGeek, mais on savait quand même produire du machin inutile et compliqué.
  • Quoi qu'il arrive, les encyclopédies sont écrites par de gros geeks poilus.
  • Je ne comprends pas où sont passées les planches de l'Encyclopédie dédiées à la gnomonique.
  • Palissy se vautre comme une otarie bourrée à la vodka sur un linoléum ciré quand je lui demande de me sortir la liste de ses cadrans solaires. J'ai bien fait de me concentrer sur les cadrans lunaires.
  • Je propose de lancer le concours de la meilleure photo d'un cadran lunaire d'époque, prise lors du fonctionnement nominal de la machine.

lundi 9 août 2010

Icebergs

Wikipédia, c'est bien connu, possède des articles sur tout. Bien sûr, ça désespère ceux pour qui la liste des pokémons ne devrait pas être mis au même niveau que la physique théorique. Mais comme personne ne les écoute, tout va bien.

Etdoncques, Wikipédia possède également des articles sur des icebergs. Pas le phénomène, attention (bien qu'il possède son propre article également) : des icebergs individuels.

Par exemple, B-15, détaché de l'Antarctique en 2000 et qui n'a toujours pas entièrement fondu. Ou B-17B, qui s'est promené pas loin de l'Australie. Ou T-3 (la poétique des noms des icebergs est admirable), utilisé comme station de recherche pendant plus de 30 ans, avec une piste d'atterrissage et tout.

Il y a quelque chose de formidable à consigner dans une encyclopédie des blocs de glace stériles qui disparaitront inexorablement. D'un autre côté, la totalité du contenu disparaitra un jour, alors pourquoi pas les icebergs ?

mercredi 21 juillet 2010

Et il parait qu'on se demande encore pourquoi l'Europe déclinerait...

Il y a quelques jours, la sonde Rosetta a survolé l'astéroïde Lutèce. C'est un astéroïde d'un fort beau gabarit, le plus gros a avoir été reçu la visite proche d'une sonde spatiale. La moisson photographique fut intéressante, remplie d'images d'une énorme montagne toute cratérisée.

Oui, mais voilà.

Le problème, c'est que Rosetta est une sonde européenne.

Par conséquent, tandis que les anglophones ont à leur disposition une splendide image toute détaillée sur leur article, nous autres francophones devons nous contenter d'un bidule flou pris de loin sur le nôtre. Et ça m'étonnerait que ce gif mal fichu, aux couleurs étranges, à la résolution de miniature et aux détails imperceptibles, passe l'été.

Pour l'avenir de la Connaissance, exigeons de l'ESA qu'elle arrête immédiatement tous ses programmes spatiaux et délègue désormais toutes ses missions à la NASA, seule à même à fournir l'humanité toute entière en documents dignes de ce nom.

lundi 12 juillet 2010

En fait, je m'en tape complètement

Je n'ai absolument rien à dire sur la réforme du CAr.

vendredi 25 juin 2010

Hoxne Hoard

Le British Museum plonge dans le wikilove, en ce moment. Le musée a accepté un Wikipédien bénévole en résidence (coucou, Witty lama), accompagné une cohorte de contributeurs en backstage, promis un prix pour les premiers AdQ portant sur sa collection, et j'en passe (il existe une page dédiée, allez y jeter un coup d'œil).

Voici maintenant le Hoxne challenge. Prenez l'article sur le trésor de Hoxne (une collection d'objets romains en or et argent, exposée au BM) ; une semaine auparavant, ce n'était guère qu'une ébauche. Le but : en faire un candidat AdQ en 7 jours. Aujourd'hui vendredi 25 juin, près de huit contributeurs se retrouvent au musée, ont accès à l'ensemble de la collection (les objets exposés et ceux qui ne le sont pas) ainsi qu'à toute la documentation disponible et à un panel d'experts prêts à répondre à leurs questions. Ensuite, ils éditent l'article pendant quatre heures.

L'expérience prend fin ce soir. Pour ce que j'en vois, le résultat est déjà appréciable. Une sacrée initiative.

jeudi 24 juin 2010

Monuments historiques

Récemment, j'ai temporairement délaissé les œuvres publiques pour rejoindre la cabale « Monuments historiques ».

Mise en contexte : en France, les monuments historiques, ce sont des monuments qui bénéficient d'un statut juridique spécial du fait de leur intérêt. En principe, ça doit servir à les protéger (en principe seulement, mais c'est l'idée). Patrimoine, tout ça. Actuellement, il existe plus de 43 000 bâtiments qui bénéficient de ce label. Ça peut aller du château de Versailles, avec une vingtaine de bâtiments distincts, à la simple rampe métallique d'une ferme au fin-fond d'un village.

Pour Wikipédia, l'intérêt, c'est d'offrir une liste de bâtiments clés en main. Curieusement, personne n'a encore exigé de définir des critères d'admissibilité sur les monuments historiques (« parce qu'on ne va quand même pas écrire des articles sur toutes les croix de village, quand même ! »). J'aurais tendance à dire que tout bâtiment MH est intrinsèquement admissible, vu qu'il est possible de trouver de la documentation secondaire dessus (chaque dossier de classement doit occuper au moins un carton entier), mais vous connaissez Wikipédia : s'il est possible d'inclure tous les éléments d'un sujet sans se poser de question, certains contributeurs s'étiolent. J'imagine que ça va venir.

Curieusement, personne n'avait recensé ce qui a été fait à ce propos sur Wikipédia. Je me suis donc lancé dans des listes départementales. Sur la suggestion de Coyau, j'ai entrepris des catégorisations par année de classement ou d'inscription (c'est un élément intéressant : au début du mouvement, on a surtout classé des églises et des châteaux ; le concept de monument historique a évolué par la suite). J'ai pondu un premier résultat : Wikipédia possède déjà des articles sur près de 6% de tous les bâtiments MH. Certes, le résultat dépend fortement des régions, mais c'est très encourageant, d'autant plus que les articles ne sont généralement pas vides (pas toujours bien rédigés, mais c'est un autre problème).

Tout comme l'art public, les monuments historiques peuvent être un moyen facile de faire de la publicité pour l'action wikipédienne. Les infos sont trouvables et le sujet rentre pile-poil dans ce que j'imagine être la perception standard d'une encyclopédie : la Culture, c'est porteur. En outre, le projet est animé par des gens motivés. Autrement dit, là dessus, il y a moyen d'accroitre facilement la visibilité de Wikipédia.

lundi 21 juin 2010

Lettres

J'aurais bien aimé vous parler, moi aussi, de la réforme du CAr. Mais non seulement je n'y comprends rien, mais en plus je m'en fous complètement. C'est dommage, ça m'aurait donné l'illusion d'être impliqué dans Wikipédia au lieu de me contenter de créer du contenu.

Parlons d'autre chose, donc. Récemment, un collègue blogueur me parlait de cet cet outil (qu'il avait trouvé en farfouillant sur l'annexe:Translittération du Wiktionnaire). L'outil en question permet de transcrire un texte écrit selon un alphabet dans un autre alphabet. Et c'est ma foi fort pratique (bien entendu, il s'agit de la transcription anglaise : « Путин » renvoie « Putin », pas « Poutine » ; il va falloir vous y faire, à ce monde qui n'accorde aucune importance au français).

À ce sujet, Wikipédia comporte quelques articles non seulement sur ces langues, non seulement sur ces alphabets, mais également dans certains cas sur les lettres elles-mêmes. Les lettres de l'alphabet latin se taille forcément la gros du morceau, mais le grec est présent et des ébauches existent pour l'arabe, l'arménien, le géorgien, l'hébreu et même le syriaque ; le cyrillique est présent, mais en partie seulement. Au niveau des syllabaires, on compte les kanas japonais.

Que manque-t-il ? En gros, les alphasyllabaires du sous-continent indien (bengalî, birman, dévanāgarī, gujarati, gurmukhī, kannada, malayâlam, oriya, tamoul, télougou, thaï), le ge'ez éthiopien, , le hangeul coréen, le khmer et l'inuktitut. Au total, ça peut faire quelque chose comme 500 à 1 000 articles. Avis aux amateurs...

(Voilà, si ça c'était pas un billet poulpique, je sais pas ce qu'il faut !)

lundi 7 juin 2010

Organisons les Capétiens !

Un truc pas super connu de Wikipédia (et pas vraiment utile, quand on y songe), c'est la série des pages spéciales. On y trouve par exemple la liste des articles les plus longs, ceux dont l'ouverture risque de faire planter votre navigateur, même récent.

Le plus long est la généalogie générale des Capétiens. Attention ! Avec 734 531 octets au compteur, il est vraiment long. Ce formidable article décrit de façon détaillée l'arbre généalogique, sous forme d'un long arbre en mode texte. C'est totalement imbuvable, quasiment inexploitable et globalement illisible, même sur grand écran. Et histoire d'enfoncer le clou, voici ce que j'obtiens quand j'ouvre la chose avec mon téléphone :


Ne pas pouvoir scroller à droite dans ce cas est assez ennuyeux, mais la page fait exploser la gestion du navigateur.


Seulement voilà : à priori, cet article ne peut pas être passé par les armes puisque cette sacrée généalogie a quand même eu une certaine importance dans mon pays par le passé.

Je lance donc un concours : comment faire pour que cette page puisse enfin ressembler à quelque chose d'humain ?

mercredi 2 juin 2010

Et si on comptait les points ?

Sur Wikipédia, tout commence par une liste. Ou devrait. Me contredisez pas. Ça permet de cerner le sujet et de savoir ce qu'il reste à créer.

En ce moment, les listes sur l'art public se multiplient. En anglais, on a donc : En français, ça nous fait : Si on se limite aux seules sculptures en plein air, on peut rajouter : Bien sûr, il y a plein de trucs pas triés dans les catégories Public art, Outdoor sculptures et Sculpture en plein air.

Allez, au boulot. Le monde vous regarde, vous savez.

vendredi 28 mai 2010

Néologisme vraiment néo

Le Wiktionnaire, c'est entendu, est le plus beau projet de la galaxie Wikimedia. Ce point ne soufre aucune contestation.

Cependant, il possède ses limitations.

Hier, un collègue me parlait du concept d'« accenturisation ». Pour ceux qui ne sont pas du milieu, Accenture est une boite de conseil. Une très très grosse boite. Une blague courante dans le domaine de l'informatique de service, c'est l'omniprésence des consultants (je le sais, j'en suis un). Toutes les boites de conseil ont tendance à vouloir s'incruster dans les projets, genre « j'y suis, j'y reste » et à y placer le maximum de consultants. Forcément, quand c'est des énormes boites comme Accenture (ou son copain Cap Gemini, pas de jaloux), ça peut prendre des grosses proportions. :)

Bref, j'ai entendu quelqu'un dire hier qu'il préférerait qu'on « ne se fasse pas accenturiser ». Et moi, la seule chose que je me suis dit, ce fut : « mmm... Dommage, ce verbe ne pourra pas être placé dans le Wiktionnaire ».

C'est ballot, non ? :D

PS : je précise, avant qu'on m'accuse de dénigrement, que je n'ai rien contre Accenture. Après tout, ils font généralement le sale boulot que je n'ai pas envie de faire. :)

jeudi 27 mai 2010

Voyage dans le métro de Paris

Ces derniers temps, j'ai pris le métro. Certes, j'habite à Paris donc ce n'est pas trop la grosse révélation. Le truc, c'est que je me suis baladé dans certaines stations pour vérifier que certaines œuvres y existaient toujours.

(Là vous devez vous dire : "oh non ! pas encore un billet sur l'art public !" Ben si. C'est mon blog et ma marotte du moment, donc voilà.)

Il se trouve qu'il y a quelques œuvres d'art dans le métro, à Paris (essentiellement des peintures sur les carreaux de faïence). Certes, on n'atteint pas le niveau des métros de Bruxelles ou de Stockholm, mais je fais avec ce que j'ai sous la main.

Donc, je passais il n'y a pas longtemps à Châtelet, empruntant le long couloir de correspondance entre les lignes 11 et 7 et le reste de la station, quand je me rends compte que les murs sont décorés d'une frise et que, pour une fois, un cartel semble expliquer de quoi il en retourne. Donc, je reprends le tapis roulant dans l'autre sens (le cartel est bien sûr en plein milieu du couloir) et comme je n'ai pas le temps de lire, je refais un troisième fois le parcours, mais à pied. Là, je constate qu'il s'agit d'Obliques enrubannées, une peinture murale d'un certain Hervé Mathieu-Bachelot. Et mieux que ça : le cartel liste les autres stations où le monsieur aurait placé des œuvres.

Évidemment, je me dis : "trop bien, je vais mentionner ça sur Wikipédia". Sauf que voilà : le titre des œuvres n'est pas mentionné et il me semble que la moitié de ces stations en question ont été rénovées récemment... Donc je suis allé voir sur place. Oh, pas d'un coup, bien sûr : ça m'a pris un bon mois, au petit bonheur de mes pérégrinations parisiennes. Le résultat : dans trois stations, je n'ai rien trouvé. Et j'en ai trouvé une dans une station qui n'était pas mentionnée.

La conclusion de tout ceci ? Est-ce qu'une plaque affichée dans le métro est une source acceptable sur Wikipédia ? Et si je vais sur place et que je constate qu'en fait, y'a plus, est-ce du TI ?

En tout cas, ça me fait voyager...

PS : à tous ceux qui râlent parce qu'on a créé des articles sur les rues de Paris (ou sujets assimilés) parce que pas encyclopédique et sans aucun intérêt, je vous assure que, quand on a à indiquer la localisation d'une statue, on est content d'avoir des liens bleus. C'est aussi ça, Wikipédia : on ne sait jamais trop comment vont servir les articles.

jeudi 20 mai 2010

Malamanteau

« Encyclopedic adj.: limited, censored, excluded, particularly with reference to subjects of which the writer disapproves or of which the writer has no knowledge. »

Pour un sujet donné, il n'existe que deux possibilités : être mentionné sur Wikipédia ou ne pas l'être. L'idée générale, c'est que si c'est notable et vérifiable, ça peut être casé sur le site, mais c'est bien sûr plus compliqué que ça. Comme tout livre sacré qui se respecte, les principes fondateurs ont été écrits bien après le début des événements et ils sont suffisamment flous pour être interprétés comme on le désire. Bref, en pratique, il s'agit surtout de savoir combien de personnes désirent faire figurer le sujet sur WP. S'ils sont plus nombreux que les opposants, c'est gagné (et ces derniers disent que tout est foutu, etc.). C'est classique.

La semaine dernière, le webcomic xkcd a publié un pastiche d'article wikipédien présentant le terme « malamanteau », défini comme « un néologisme désignant un mot-valise créé de façon incorrecte en combinant un abus de langage avec un néologisme ». La syntaxe, la mise en page et les termes choisis trahissent chez l'auteur du webcomic une très bonne connaissance de Wikipédia. Bien sûr, xkcd étant beaucoup lu, il savait parfaitement que son néologisme allait être créé sur Wikipédia. Et comme il en a une très bonne connaissance, il pouvait se douter que ça allait batailler grave. En somme, c'est un bon gros hack de Wikipédia, le meilleur que j'ai vu pour l'instant.

Personnellement, avec mon inclinaison naturelle pour le chaos et l'irrespect léger (je me la joue ? Eh bien je me la joue), je ne peux qu'approuver cette démarche. Vous vous doutez bien que la blague ne fut pas du goût de tout le monde et que des termes comme « irresponsable » furent émis. Wikipédia, c'est sérieux, bordel !

Après une semaine de combat, la page de discussion de l'article a été éditée plus de 1 300 fois. Une page d'archive a été créée, grosse de près de 225 ko et comportant 65 paragraphes. L'article a été consulté plus de 170 000 fois en une semaine, dont 72 000 fois le premier jour. Au final, l'article a terminé sous la forme d'une redirection vers le paragraphe « Themes » de l'article sur le webcomic. Comme ça, l'égo wikipédien est sauf (ainsi probablement que la morale, la culture et certainement la Civilisation occidentale).

Finalement, c'est le site urban dictionary qui résume le mieux l'histoire : « malamanteau: a word defined to infuriate Wikipedia editors ». Ah, c'était drôle tant que ça a duré. :)

Pour ma part, je me dis que le mot pourrait bien être créé sur le Wiktionnaire, avec la Catégorie « hapax en anglais », mais je n'ai pas encore les épaules assez solides pour tenter le coup, cliquer ici, écrire le texte et sauvegarder. On serait capable de me dire qu'un dictionnaire universel n'a pas vocation à recueillir tous les mots, même si leur utilisation est vérifiable. Déjà qu'on me raconte qu'une encyclopédie universelle n'a pas vocation à recueillir tout le savoir...

mercredi 19 mai 2010

Salutaire complexité

On entend souvent dire que la Science sert à expliquer le monde, à le caser dans des boites, à le rendre plus simple. C'est un contre-sens courant : le but de la Science, c'est d'introduire de la complexité. Dépasser le bon-sens simpliste. Produire des résultats contre-intuitifs. Casser les classements évidents. Mettre en évidence les biais, les exceptions, le temporaire. Bref, tout faire qu'on vienne raconter ensuite que la Science perd pied avec la réalité et ne sert vraiment à rien.

Toutes proportions gardées, Wikipédia joue un peu ce rôle là. J'y pensais en lisant un billet du blog de DainDwarf (coucou, toi, bienvenue sur la blogsphère wikipédienne francophone) à propos du modèle {{pistes}}. Ce modèle permet d'organiser le listing des pistes d'un album (titre en italique, durée, etc.). Personnellement, je pense que c'est une belle usine à gaz, mais c'est un autre problème.

Quand j'ai vu ce modèle, je me suis dis qu'il avait sûrement été créé de bonne foi avec une vision simple de son application : un album d'une quinzaine de pistes au format CD audio tout bête. C'est certainement injuste de ma part : le modèle a l'air assez flexible et proposait dès le début de monter jusqu'à 99 pistes. Et en fait, ce n'est pas vraiment de ce modèle dont je voudrais parler en ce moment.

Quand en 2010, dans le monde occidental, on pense « musique », on pense souvent « album ». Et quand on pense « album », on veut dire « CD ». Bon, bien sûr, il existe des exceptions, mais c'est marginal. Forcément. Des trucs bizarres certainement. Pas mentionnables. Pas notables. Des machins qui ne viendraient pas à l'esprit d'une personne normale. Pas des VRAIS albums, quoi (et pas de la VRAIE musique de toute façon).

Le concept d'album comme support musical principal ne date que de quelques décennies (les Beatles sont essentiellement à blâmer, mais l'industrie du disque en a fait son business model le plus rentable). Le privilégier, c'est avoir un biais européen contemporain. Beaucoup d'autres formats ont existé (ou existent toujours) : EP, mini-LP, 45 tours, maxi 45 tours, single et j'en passe. En plus, le développement des boutiques en ligne pousse à privilégier la piste sur l'album ; j'ai d'ailleurs déjà vu des netlabels qui ne font que des éditions à la piste.

Au niveau support, on a le CD audio, mais également bien sûr le DVD, le vinyl ou la cassette. Et puis il y a tous les autres : le cylindre, le minidisc, la carte SD ou la cartouche NES. Et je passe sous silence les formats numériques (mp3 128, 320, FLAC, etc.) ou même les music disks.

Dans son billet, DainDwarf évoquait les pistes cachées. Mais il faut également prendre en compte les éventuels prégaps. Et, bien sûr, les pistes cachées à l'intérieur du premier prégap (c'est-à-dire lisibles uniquement en revenant en arrière à partir du début de la première piste). Quand à définir une durée pour les pistes vinyles qui se terminent par un sillon infini...

Et puis si vous pensez que toutes les éditions d'un album précisément nommé sont toutes identiques, vous vous mettez le doigt dans l'œil. Et ça peut être coton de définir une discographie chronologiquement exacte, même chez les groupes connus.

Bref.

Ce que je veux dire au final : même pour un sujet aussi banal que la musique populaire des 50 dernières années dans le monde occidental, il est facile de tomber dans la simplification excessive et de prendre ce qui n'est que le format majoritaire pour le VRAI format (entendre : le reste, c'est pas vraiment important). J'aime bien ce côté de Wikipédia, quand le site mentionne ce qui ne rentre pas dans les cases. Wikipédia est peut-être une encyclopédie, mais sa structure anarchique contraint à poser sur le monde un regard différent : les classements ne sont jamais absolus, l'exception est la règle, la majorité n'est jamais qu'un point de vue. Wikipédia rend le monde plus complexe.

Alors, bien sûr, quand on regarde ça de loin, on se dit que Wikipédia pinaille et passe à côté des VRAIES choses importantes. C'est une erreur : ce pinaillage permet justement de se rendre compte des choses vraiment importantes.

mardi 18 mai 2010

La pornographie sur Wikipédia

Quand je pense que Commons héberge des photos de bittes et de chattes, accessibles aux plus jeunes sans la moindre restriction, et sans qu'aucune mesure ne soit prise...

mercredi 12 mai 2010

Surtout, ne pas hésiter

Tiens, puisque c'est ma marotte du moment, je me suis rendu compte d'un truc marrant, à propos de la liste des œuvres d'art de la Défense.

Lorsque j'ai créé cette liste en 2007 (par un après-midi de février où je devais m'ennuyer, seul, au 12e étage de la tour Cèdre), je n'ai placé des wikiliens que sur les artistes, mais pas sur les œuvres. Avouez que à rentre un peu en contradiction avec le titre même de la liste. Mais à l'époque, ce que je me suis dit, c'est : purée, je suis quand même gonflé de faire un article comme ça, à coup sûr il va gicler en PàS en moins de deux. Alors, vous imaginez bien que placer un lien rouge sur chaque œuvre, c'était un appel au crime. En bref : en 2007, je me suis auto-censuré.

Comme je le racontais hier, je n'ai créé en masse les articles sur les œuvres que le mois dernier. Je n'ai pas changé de position sur l'inclusionnisme ou le suppressionisme en trois ans : je suis juste tombé sur un groupe d'Américains pour qui Wikipédia est un excellent moyen, simple et gratuit, d'organiser leurs connaissances. Du coup, je me suis dit : pourquoi pas moi ?

Quand on essaye d'expliquer les fondamentaux de Wikipédia, on parle forcément de vérifiabilité, de notabilité, de sources et de tout un tas d'autres trucs complètement chiants (ok, j'ai pas dit que c'était pas important, juste que voilà, hein). En revanche, on ne cite jamais celle par laquelle l'encyclopédie doit son succès, celle qu'on essaye de cacher sous le tapis dès qu'on peut : n'hésitez pas !.

Be Bold, c'est l'équivalent WP du Just do it de Nike : un état d'esprit totalement américain et difficilement compréhensible ailleurs. Ça ne veut pas dire : "fais n'importe quoi", comme c'est généralement interprété. Ce que ça veut dire, c'est : "tu penses que ça vaut le coup ? Fais le. Après, bien sûr, tu vas te confronter au monde extérieur et tu risques d'avoir tort, mais on s'en fout. Tu es une personne à part entière : agis."

Il y a trois ans, j'ai hésité. Du coup, j'ai perdu trois ans.

PS : pendant que j'y suis, allez jeter un coup d'œil à cette interview de certains membres du projet anglophone WSPA. Ils y parlent de l'approche qu'on peut avoir de WP en tant que conservateur ou étudiant en art, des possibilités offertes par le médium et de tout un tas de trucs intéressants.

mardi 11 mai 2010

Élevage d'articles

Il y a environ un mois, je décidais d'aller créer des articles sur la soixantaine d'œuvres d'art de la Défense. Maintenant qu'un mois est passé, je suis allé jeter un œil sur grok voir si les gens lisent mes écrits.

La liste est consultée environ 15 fois par jour. Sur un mois, ça fait 450 à 500 consultations. Pas énorme, mais bon... C'est après tout un sujet de niche, donc c'est déjà pas mal.

Sinon, pour les articles sur les œuvres elles-mêmes, ça varie beaucoup suivant l'artiste. Le Calder est le plus consulté (340 fois en un mois), suivi du Barrias (200 fois), du César (110 fois), du Serra (80 fois) et du Miró (80 fois aussi). Curieusement, Boréale d'Adam-Tessier est vue 150 fois dans le mois, mais je soupçonne qu'il s'agit de fautes de frappe. Après, seules une vingtaine d'œuvres sont vues au moins une fois par jour. Certaines ne le sont qu'une fois tous les deux-trois jours. Une longue traîne typique, en fait (50% du trafic provient d'articles réalisant individuellement moins de 2% du total).

Au total, l'ensemble du lot aura quand même attiré 3 000 visiteurs dans le mois, soit 5 fois plus que la liste seule. Ça me semble être un argument en faveur de la création d'articles dédiés pour chacun des éléments. Au final, le nombre de consultations n'est pas du tout négligeable. Il est possible que le fait d'avoir un jeu complet d'articles individuels sur le sujet soit un atout ; c'est juste une supposition, par contre.

Pour l'instant, les articles sur les œuvres sont très peu liés au reste du monde (il me semble que la quasi-totalité n'est accessible que par la liste elle-même). Il faudrait que j'arrive à augmenter leur visibilité, voir si ça change quelque chose.

Petit edit, après coup : il va de soi que je ne parle ici que des consultations. Puisque selon le premier lemme poulpique, il faut un millier de consultations pour obtenir une unique modification, on peut se douter que mes ébauches le sont restées. Et comme j'ai tout ça en liste de suivi, je vous le confirme. Dure, la vie.

vendredi 30 avril 2010

Art public : une mise à jour

Adoncques me suis pris au jeu de l'art public et urbain. Après m'être tapé tout ce que la Défense compte comme sculptures monumentales, je me suis dis qu'on pourrait passer à la vitesse supérieure. Tiens, justement, il se trouve que j'habite à côté d'un capitale assez riche en éléments de ce genre ; pourquoi pas, alors ?

L'année dernière, j'ai créé une « liste de sculptures en plein air de Paris ». Je ne sais plus pourquoi. Ni pour quelle raison j'avais juste inclus huit statues dans la liste. Et puis c'est resté dans cet état pendant plus d'un an jusqu'à ce que je me dise « basta ! C'est ridicule, faut se bouger un peu, on va jamais arriver à rien sinon. » J'ai réorganisé ça par arrondissement, histoire d'avoir une séparation en paragraphes, et j'ai rajouté un peu ce que je pouvais. À un moment, j'ai renommé la chose en « liste des œuvres d'art public de Paris » puisqu'on dépassait la simple sculpture. Et puis ça a grossi tout seul. Actuellement, on a dépassé les 400 œuvres. Certains arrondissements se taillent la part du lion, bien sûr. Et la plupart des œuvres sont en fait visibles dans trois endroits (les Tuileries, le musée de la sculpture en plein air et le jardin du Luxembourg). Sacré listing quand même. Histoire de ne pas surcharger tout ça, les fontaines, les monuments aux morts et même les cadrans solaires ont leur article propre. Mais je sens qu'il va falloir scinder la liste par arrondissement à un moment.

C'est un boulot assez fun à faire, en réalité. On se confronte très vite à des problèmes très concrets : l'œuvre existe-t-elle toujours ? Est-elle accessible ? D'ailleurs, qu'est-ce qu'une œuvre d'art (là, on n'a pas la réponse, désolé) ? Et puis, le machin, là, tu sais comment il s'appelle et qui l'a réalisé ? À chaque fois, on essaye de mentionner le titre de l'œuvre, sa date de création et son créateur. J'ai été surpris du nombre d'artistes qui possèdent déjà leur fiche sur Wikipédia.

En revanche, la politique officielle de mon pays à ce sujet semble assez claire : surtout, ne donner aucune possibilité de trouver facilement des infos. Tout fragmenter au possible. Réduire les possibilités d'exploration des citoyens. L'art, même urbain, même public, même accessible à 3h du mat' par un type bourré, c'est trop important pour que les gens y aient accès comme ça. Et puis il y a cette fameuse absence de fair use et de liberté de panorama (exemple extrême : l'article sur Maillol est illustré par deux photos prises aux États-Unis et aux Pays-Bas ; pas mal pour un sculpteur français fondamental auquel est dédié tout un espace du jardin des Tuileries, le plus proche du Louvre, avec une vingtaine de sculptures...). Tant pis. Vous voulez que la création française continue à n'être qu'une note en bas de page à partir du XXe siècle ? Persistez dans ce sens, les cocos. Moi, je vais pas aller violer la loi, hein.

Je dis ça, je dis rien, mais les Américains motivés ont accès à toute une base de données fournie par la Smithonian, facilement navigable, avec détails complets et photo éventuelle de 350 000 œuvres. Voilà, voilà... Mais nous, il est vrai que nous avons l'Histoire ; ça doit probablement nous dispenser de faire quoi que ce soit d'entreprenant.

Bref, la liste de Wikipédia sur Paris est probablement unique en son genre. Si c'est pas du service public, je ne sais pas ce que c'est. Elle existe aussi pour la Défense, Ivry-sur-Seine et Guyancourt, trois endroits avec une forte politique locale pour l'implantation d'art dans la ville (et à chaque fois des approches différentes). Si vous habitez ailleurs, lâchez-vous et débutez une liste. Dites-vous : c'est pour le bien de vos concitoyens.

Un dernier point que j'ai déjà évoqué : la notoriété. Curieusement, l'art public n'a jamais été envisagé sur fr: (sur en: non plus, d'ailleurs, si j'en crois ce paragraphe). Comme dit l'un des participants du projet anglais : si c'est créé par un artiste notable ou commissionné par une organisation pour être placée dans l'espace public, c'est sûrement notable. Pour Paris, je ne me fais pas trop de souci, chaque sculpture a sûrement déjà été citée quelque part. Oh, et puis comme on dit chez nous : n'hésitez pas.

dimanche 25 avril 2010

Le compte-rendu de la CabaleIdF ? Je pourrais vous en parler, mais vous seriez obligés de me tuer après (ou un truc comme ça, c'est pas trop clair)

Samedi, j'étais assis dans un bus. C'était la fin de l'après-midi et je traversais l'échangeur de Bercy. Samedi, on m'a également dit que les comptes-rendus de cabale étaient appréciés. Les deux événements ne sont pas exactement liés mais conduisent à ce billet de blog.

Je suis en train d'écouter un bon vieux KMFDM des familles (depuis quand le rock industriel allemand est-il devenu « des familles » ?), j'écris seul dans mon appartement, mes pieds bougent en rythme et ils vous faut savoir que « Cabale Île-de-France » est un autre terme pour « on va boire un verre ; t'es libre ? » J'ignore comment procèdent les autres. Peut-être ont-ils des plans établis, mettent-ils en œuvre de réels façons de faire progresser Wikipédia ? Va savoir. Ah oui, j'oubliais, il m'arrive de hocher la tête en rythme avec la musique (j'aime bien leur reprise de Mini mini mini).

Donc, vers 17h, j'ai retrouvé une grande Blonde à casquette devant Saint-Germain-l'Auxerrois non sans avoir admiré l'œuvre d'art juste devant (Hautes Herbes, Béatrice Guichard, 2003). Cette rencontre s'est organisée en plusieurs temps : tout d'abord un tweet de ma part (« y'a quelqu'un qui veut marcher dans Paris c'tantôt ?»), puis un tweet de sa part (« oui »), puis la convenance d'un point de rendez-vous. J'aime quand un plan se déroule sans accro.

Je vous révèle le plan secret de la CabaleIdF pour la fin d'après-midi du 24 avril 2010 :
  • 1. Relier la place du Louvre à Edgar Quinet à pied.
  • 2. Parler d'un peu tout, et pas trop de Wikipédia.
  • 3. Éviter la ligne droite.
  • 4. Prendre n'importe quoi en photo.
Voici donc les conclusions de la réunion :
  • GBàC prend encore plus de choses que moi en photo.
  • Les glaces, c'est bon.
  • La rive gauche sous le soleil déclinant est agréable à visiter.
  • Le musée Zadkine ferme à 18h. Zut.
  • Commons, c'est quand même compliqué.
Sérieusement, je suis content d'avoir lancé cette idée de CabaleIdf. Je vois des gens, on se parle, je ne reste pas mon coin. Faudrait qu'on mette en place un truc plus évolué que Twitter pour tout formaliser, quand même.

mardi 20 avril 2010

jökull, jökul, jökli, jökuls

Le Witionnaire, c'est bien connu, ne fonctionne qu'avec des modèles. Il y en a pour tous les styles : pour indiquer que l'étymologie d'un mot islandais vient du vieux norrois ({{étyl|non|is|mot=jǫkull}}, avec création de la catégorie qui va bien), pour les déclinaisons du grec ancien ({{grc-décl-nomf-1-ή-ῆς|θηλ}}) et j'en passe.

Mais là, franchement, je crois que le code pour la déclinaison des noms islandais masculins de type s1, sur en:, explose tout.

jeudi 15 avril 2010

Œuvres publiques, œuvres privées

Encouragé par mon billet sur l'art urbain, je me suis pris au jeu de la création d'article. Pour commencer, j'ai ébauché « Art public » ; le terme ne me semble pas très heureux, mais l'article manquait.

Trois ans auparavant, je me suis tapé la liste des œuvres d'art de la Défense. En effet, le quartier de la Défense, outre des tours de bureaux, contient une soixantaine d'œuvres contemporaines réparties à droite à gauche. Je bossais dans le coin et je trouvais ça sympa d'aller les dénicher à la pause de midi (l'ex-EPAD édite une brochure en pdf pas mal du tout sur le sujet).

Cette fois-ci, j'ai pris mon courage à deux mains et je suis allé faire des ébauches sur chacune de ces œuvres. Malheureusement, il y a un gouffre entre l'état de dilettante et celui de conservateur, donc c'est un peu chaud pour moi d'aller plus loin que ça. Mais j'espère que ça se développera. De façon générale, on manque énormément de wikipédisme sur ce type d'œuvres.

Le problème de ces articles, c'est les photos. Actuellement, il n'est possible de placer sur Commons que La Défense de Paris, vu que Barrias est mort en 1905. Après lui, il faudra attendre les dates suivantes pour les œuvres concernées :
Pour la cinquantaine d'autres œuvres, si leur auteur meurt cette année (ce que je ne leur souhaite pas le moins du monde), ça sera après 2081. Bref, on pourra illustrer complètement mon article créé en 2007 bien après le début XXIIe siècle. La Loi est dure, mais c'est la Loi.

mardi 13 avril 2010

Cycle en V

Pour une fois, un post qui n'a rien à voir avec Wikipédia. Je suis à la recherche de l'origine de ce dessin bien connu qui met en lumière le fonctionnement du développement logiciel depuis le besoin client jusqu'au support client.


(Cliquez pour voir le truc en plus gros)


Je crois en avoir déjà vu une photocopie dans la chambre du grand frère d'un copain il y a au moins 20 ans de ça, donc ça a l'air de remonter à loin. Quelqu'un a des idées ?

dimanche 11 avril 2010

Ne jamais dire « ça ne sert à rien »

En 2005, un certain utilisateur initiait un article sur Roza Otounbaïeva, une femme politique kirghize, ancienne ministre des Affaires étrangères du Kirghizstan. Typique le genre d'article qui doit être totalement hors critères.

Entre temps, le pays a connu quelques soubresauts et les derniers événements ont propulsé Roza Otounbaïeva à la tête du gouvernement provisoire. Autrement dit, elle est ce qui ressemble actuellement le plus à la présidente du Kirghizstan.

Comme quoi, hein...

mardi 6 avril 2010

Wikipédia sauve l'art urbain

L'un des biais qui m'a le plus marqué, dans mon aventure wikipédienne, est cette tendance à considérer le monde immédiat comme quantité négligeable. Pour faire simple : ce qui est mentionné dans les livres, c'est Bien (attention : les VRAIS livres) et le reste n'est ni intéressant, ni encyclopédique.

Cette approche m'a toujours paru étrange : indépendamment des fameux critères de notoriété et des travaux inédits (qui sont deux problèmes annexes, même si on tend à tout mélanger), j'ai souvent eu l'impression que l'idée qu'on se faisait de l'encyclopédie idéale, c'est un gros bouquin qui résume grossièrement ce que les autres ont déjà dit ailleurs : plus le sujet est rebattu, plus il est encyclopédique. Bref, un machin inutile depuis qu'on ne remplit plus les armoires des salons avec des ouvrages en quinze volumes.

Via Twitter, j'ai appris l'existence du projet anglophone Wikipedia Saves Public Art. Son but : créer des articles précis, informatifs et à jour sur les œuvres d'art urbain. Ces œuvres sont bien souvent éphémères, mal documentées, mal aimées : leur conservation est soumise à rude épreuve. Le projet cherche, non pas à les sauver, mais à en garder une trace. Un exemple : la sculpture Zephyr de Steve Wooldridge installée sur le campus d'une université d'Indianapolis en 1998 (avec un article de journal ici pour bien faire).

Je trouve ce projet admirable. J'ai souvent peur que nos préjugés ne nous conduisent à négliger l'environnement dans lequel nous évoluons, juste parce qu'il nous est immédiat. C'est une approche, à mon sens, erronée.

L'autre chose qui m'ennuie, c'est l'écho que recevrait un tel projet dans la Wikipédia qui est la mienne. Si je me créais un article sur l'inénarrable bague de fiançailles de Goldorak à Ivry-sur-Seine, est-ce que ça ne serait pas immédiatement passé par les armes ?

mercredi 31 mars 2010

Art illégal

J'ai toujours apprécié le street art. J'en aime l'imprévu, l'inattendu, l'absurde, l'irrévérencieux, le décalé, le do-it-yourself, le je-m'en-foutisme, l'improductif, l'éphémère.

J'habite dans un quartier (l'Est parisien) qui en contient quelques exemples. Entre les pochoirs, les collages, les mosaïques, les sculptures, les grafs, les fresques et les techniques que j'oublie, je pense qu'il doit bien y avoir une vingtaine de séries street-artistiques en permanence. Une sacrée galerie d'art. Tenez, sur cette photo que j'ai prise rue de Lappe dans le 11e, le coin de mur compte pas moins de cinq séries distinctes (à vous de les trouver). Et les alentours en contenaient encore d'autres.

Allez, combinons ça à mon dada perso. Sur le street art, Wikipédia est bien légère. fr: possède une catégorie pour ça (forcément francisée en Art de rue) tandis qu'en: tend à dispatcher tout ça dans des tas d'endroits. Normal, quoi.

Sur Wikipédia, on a des critères pour les arts visuels (avec raison, vu tout ce qui passe). Partons du principe que le potentiel wikipédien de mes séries est invérifiable. Pour figurer sur Wikipédia, il faudrait qu'elles soient représentées dans les collections d'un musée reconnu, ou alors que l'artiste ait réalisé au moins deux expositions personnelles, critiquées ou présentées par des médias nationaux.

Comment dire...

Sur Wikipédia, en gros, l'art, c'est pour les musées ou les expos. C'est pas gagné.

Il y a également le problème de l'artiste. Dans ce domaine, les artistes sont bien souvent inconnus hors d'un cercle restreint (et pour cause : ils demandent rarement l'autorisation des propriétaires, ce qui n'incite pas à la publicité). Bref, ils sont littéralement invérifiables.

Et puis comment vous voulez nommer les articles ? Je connais une série qu'on retrouve un peu partout sur les murs du nord-est parisien : un hexagone de faïence contenant un bonhomme stylisé levant les bras, le tout peint de couleurs variables. Comment elle se nomme ? Le bonhomme stylisé aux bras levés dans un hexagone ?

Bien sûr, je connais la réponse toute prête : ça n'a pas à figurer sur Wikipédia. C'est dommage : c'est se priver d'une frange non négligeable de l'art contemporain occidental. Ah oui, avec des grands mots, c'est tout de suite plus impressionnant. J'ai l'impression de prêcher pour ma paroisse, mais c'est dommage, cette tendance à vouloir évacuer par principe tout ce qui ne rentre pas dans un cadre pré-établi. Wikipédia : l'encyclopédie bourgeoise ?

En passant, Commons héberge des photos d'œuvres d'Invader, un artiste qui a placé des mosaïques de Space Invaders un peu partout dans le monde. Pour ce que j'en sais, il s'agit de photo d'œuvres totalement pas libres, mais il parait que le raisonnement est le suivant : "ok, c'est pas libre, mais il demande pas l'autorisation des proprios des murs alors il peut se brosser pour faire un procès à propos d'installations illégales". Je sais pas pour vous, mais ça me semble spécieux. :)