mercredi 31 octobre 2012

Compte-rendu d'expédition

L'une de mes photos vient de se placer à la 8e place de l'édition française du concours Wiki Loves Monuments. C'est plutôt cool, je trouve.


L'image représente la Pierre Droite, un menhir du sud de l'Essonne. Ça me fait plaisir, parce que c'est justement une photo dont je suis satisfait et que j'ai délibérément conçue pour le côté artistique plus qu'illustratif. On m'a fait remarquer que j'ai plutôt respecté la règle des tiers, mais je dois avouer que le cadrage a plus été déterminé par la verticalité du menhir, la présence de son ombre au sol et celle des nuages sur la droite. Je trouvais également que la perpendicularité entre la pierre et l'horizon rajoutait à la chose.

Ce n'est pas la seule photo dont je suis artistiquement satisfait que j'ai chargée pour le concours : il en existe trois-quatre autres, comme celle-ci du regard de Saux :


Chouette contraste entre la façade de l'immeuble au fond et l'édicule de pierre devant. En plus, il flottait et la pluie est visible sur la photo, et ça m'amusait d'éviter le cliché du beau temps (même s'il est plus facile de prendre une photo par grand soleil, c'est sûr).

Dans un autre genre, et sous un ciel dégagé, cette vue en plongée de la tour nord de Notre-Dame de Paris :


Curieusement, personne ne l'avait encore prise sous cette angle, sur Commons.

De façon plus mineure, j'ai également photographié à la fois la tour Eiffel et le Louvre :


En revanche, je n'ai pas tenté de charger cette photo du Louvre sous la pluie sur Commons, je sens confusément qu'on m'aurait fait des réflexions à base de NOFOP :


La majeure partie de mes contributions à Wiki Love Monuments (175 en tout, visiblement) ne sont toutefois pas aussi arty : il s'agit de photos illustratives que j'ai chargées parce qu'elles ajoutent des infos sur un édifice, pas parce qu'elles feraient bien sur DeviantArt. C'est d'ailleurs un aspect intéressant du concours : on peut y participer pour plusieurs raisons, comme le critère artistique ou la simple volonté parfaitement wikimédienne d'ajouter sa pierre à l'édifice. Pour ma part, par contre, un point essentiel : je ne serais probablement pas allé chercher ces photos si le concours n'avait pas existé.

Voici grosso-modo mon modus operandi pour le concours : regarder les listes départementales de monuments historiques, cliquer sur le lien Google Maps tout en bas, étudier la carte localisant cette sacrés monuments et trouver un plan d'attaque. Je me suis par exemple tapé la remontée complète de l'aqueduc Médicis de cette façon.

Pour la photo gagnante, j'ai avisé le sud de l'Essonne, un petit coin autour de Buno-Bonnevaux. Pas de photos sur Wikipédia malgré la présence de six monuments protégés dans la zone, dont cinq liés au mégalithisme. Profitant du dézonage de mon pass Navigo le week-end, me voilà donc un samedi matin à la gare de Lyon à attendre un RER D qui me conduira dans le sud de l'Île-de-France. Je dépasse les merveilles d'architecture que sont les gares de banlieue franciliennes (ah la gare d'Évry Génépole en sous-sol, sporadiquement éclairée !) ; les passagers descendent presque tous ; je roule désormais en pleine cambrousse, seul dans le wagon quand j'arrive à la gare de Buno - Gironville, paumée entre le centre de Gironville et celui de Buno-Bonnevaux. Un train par heure dans chaque sens. Paris est à 60 km au nord, le Loiret à 5 bornes au sud.

Sortie de gare, remontée le long d'une départementale quasi sans bas-côtés, à ma gauche une carrière de sable : premier arrêt à la chapelle de Bonnevaux, malheureusement inaccessible derrière la grille du terrain.


La photo dans la boite, j'oblique vers l'est sur un chemin interdit aux véhicules non-riverains. Et tout d'un coup, ça grimpe : je gravis la côte qui sépare le plateau de la vallée de l'Essonne, 50 m de dénivelé en 500 m de chemin. Des deux côtés, la forêt et des vues agréables sur les pentes. C'est bientôt l'ouverture de la chasse ; les panneaux indiquent régulièrement qu'elle est privée ; les abris sont installés, prêts à l'utilisation. Et tout d'un coup, je débarque sur le plateau, les arbres s'effacent et laissent la place à l'immensité plate des champs. Le menhir de la Pierre Droite s'élève tout seul au beau milieu de rien.


C'est une belle bête, de 3,50 m au garrot. Je le photographie un peu de tous les côtés et continue ensuite mon chemin vers le sud, par une petite voie entre les champs. Peu de monde : quelques cyclistes se demandant ce que je fais là, un joggeur au loin (mais que fait-il là ?). Dans le ciel, des planeurs : le coin possède un centre de vol à voile. Dépaysement. J'arrive près de mon troisième check-point et un tracteur fait des allers-retours dans le champ d'à côté ; j'ai le sentiment que son conducteur me regarde d'un œil bizarre... Je synchronise la traversée des pieds de tournesols avec le moment où il s'éloigne de moi, vite vite.


Le polissoir de Grimery. Une longue pierre portant des traces de taille et de polissage. Soigneusement placée au coin d'un bosquet, comme si les parcelles cultivées suivaient une sorte d'héritage néolithique. C'est à la fois émouvant et un peu ridicule. Là encore, photos. Je reviens sur mes pas sur un bon kilomètre et m'engouffre dans une avancée d'arbres sur ma gauche à la recherche d'un hypogée que je ne trouverai pas (aucune indication claire pour le rejoindre et il est impossible d'explorer des sous-bois à la recherche d'un rocher de ce type sans savoir où on va). Mais le coin est sympathique. J'aboutis dans un chemin creux tout vert. Reste de bocage ? Je regagne progressivement la civilisation, maisons de moins en moins espacées, arbres de plus en plus absents. Au pied du clocher de l'église, mon dernier rendez-vous : un autre polissoir.


Celui-ci est affublé d'un grandiloquent « des sept coups d'épée de Roland ». Car Roland, comte des Marches de Bretagne mort dans les Pyrénées, est très certainement passé dans le coin pour affuter son arme dessus. On ne prête qu'aux riches. Après ça, je remonte vers la gare, attends mon train cinq minutes, m'offre le luxe de pouvoir choisir parmi un bon millier de places assises et débute ma remontée vers la capitale.

Et cette balade là, mes amis, sans Wikipédia ou le concours Wiki Loves Monuments, jamais je n'en aurais eu l'idée. Ça aurait été triste, non ?

lundi 1 octobre 2012

Comparaisons linguistiques

1 300 000 articles sur Wikipédia en français, 4 065 000 en anglais. en: possède donc 2 765 000 articles de plus que fr:. Soit donc 2,1 fois fr: elle-même. Les Anglophones n'étant pas des gens stupides (même si les Francophones ont parfois tendance à le penser), si on voulait vraiment augmenter la visibilité de fr:, la solution rationnelle consisterait à traduire de l'article anglais à tour de bras.

À chaque fois que j'ai évoqué cette idée, les mêmes ritournelles sont revenues : ces articles ne sont pas forcément bons, d'ailleurs y'a plein d'articles en français qui sont meilleurs qu'en anglais et de toute façon nous n'avons pas la même culture alors c'est pas vraiment possible. J'imagine que si la roue avait été inventée en Angleterre, la France persisterait à ne pas l'utiliser pour cause d'exception culturelle. Ce ne sont que des excuses minables pour éviter d'agir, bien sûr, et sans aucun lien avec la question qui plus est.

Là, j'ai essayé un truc : j'ai pris la liste des capitales du monde, son équivalent anglais et j'ai tout simplement comparé la taille de chacun des articles (capitales + pays) dans les deux langues. Certes, la taille n'est pas un argument qualitatif rigoureux, mais j'ai estimé que de façon générale, plus un article est long, plus il est développé (sur ce genre de sujet, ça me semble cohérent). Pourquoi les capitales ? Parce que ce sont des articles à bonne visibilité et qu'ils forment un groupe homogène tout en couvrant des possibilités d'édition multiples. Histoire d'augmenter un peu la dose d'articles, j'ai tout considéré (États indépendants, territoires d'outre-mer, pays séparatistes, etc. En plus, je n'avais pas envie de me prendre le chou à définir ce qu'est un État ou une capitale).

Ah, et j'ai pris en compte le fait qu'un texte en français est plus long que son équivalent en anglais. À la louche, j'ai estimé ce surplus à 25%.

Si ça vous intéresse, j'ai compilé les résultats dans ce tableau.

En résumé :

Sur 268 articles de capitales :
  • 2 n'existent pas en français
  • 1 n'existe pas en anglais
  • 22 sont d'une taille similaire, de l'ordre de 20% en plus ou en moins (10 concernent des territoires francophones)
  • 19 sont plus grands en français (13 concernent des territoires francophones)
  • 224 sont plus grands en anglais ; parmi ceux-ci, 80% font plus du double.

Sur 249 articles de pays ou territoires :
  • 13 sont d'une taille similaire (5 territoires francophones)
  • 12 sont plus grands en français (9 territoires francophones)
  • 224 sont plus grands en anglais, dont 80%, là encore, font plus du double en taille

Dans une optique purement qualitative, sur ce sujet parfaitement bateau, en: enfonce donc complètement fr:. Je n'ai aucune raison de penser que la chose ne se reproduit pas de façon similaire sur le reste des deux encyclopédies — et mon expérience d'utilisateur de Wikipedia me confirmerait nettement cette impression.

Perso, vue la visibilité de Wikipedia sur Internet, si je voulais faire quelque chose pour la francophonie, j'irais de toute urgence embaucher des traducteurs.