mardi 24 janvier 2012

Rêves anarchiques

Dans la communauté wikimédienne, tout le monde a déjà parlé de SOPA ou de la remise sous copyright d'œuvres du domaine public (un pur scandale, ce truc là : si le domaine public est une propriété commune, n'est-ce pas un vol pur et simple ?) et en mieux que je ne peux le faire. Alors je vais parler d'autre chose, forcément.

J'ai vu passer ça hier soir sur Twitter : Koregos. Une encyclopédie dédiée aux Arts, créée par l'Académie royale des sciences, des lettres et des beaux-arts de Belgique. Textes volontairement pointus, signés et validés par un comité de lecture : la routine. La comparaison avec Wikipédia est inévitable : Le Vif le dit d'entrée : "Vous cherchez une doc sérieuse et gratuite sur les haïkus, la statuaire primitive ou l'orientalisme ? Oubliez Wikipédia." La Libre Belgique définit carrément le site ainsi : "Koregos, le Wikipédia qualitatif". Deux exemples, deux comparaisons en creux : Wikipédia, en gros, c'est pour les p'tits rigolos.

Bon, ce n'est pas la première fois qu'on nous sort ça. Des sites qui devaient révolutionner l'approche encyclopédique et corriger les erreurs de Wikipédia, on en a eu des tonnes. Parfois, ces sites n'étaient qu'une tentative de surfer sur la hype (vous vous souvenez de Larousse ?) ; d'autres fois, ce n'étaient juste que des portails spécifiques, ce qui est éventuellement très bien mais qui n'a pas grand chose à voir avec Wikipédia. C'est peut-être le cas de Koregos, je n'en sais rien. Si ça se trouve, c'est un excellent outil.

Une constante : Wikipédia n'est jamais présentée comme un modèle, toujours une anomalie. Le processus colaboratif n'est pas perçu comme une méthode viable, mais comme le chaos. Les contributeurs de Wikipédia ne sont jamais des types sérieux qui maitrisent leur sujet, mais des amateurs un peu dingues et vaguement immatures. Bref : le modèle wikipédien est erroné. Il n'existe que parce que les gens importants n'ont pas encore eu le temps de se pencher sur la question. Mais quand ils vont le faire, ça va poutrer sa culture !

Déprimant.

Oh, ce n'est pas l'accusation d'amateurisme qui est déprimante (après tout, c'est exact). Ce n'est pas non plus le vague sourire de commisération qu'on perçoit au détour de ces textes (haussons les épaules, c'est plus simple). Ce qui est déprimant, c'est cette incompréhension profonde de ce que signifie Wikipédia. Wikipédia, ce sont des types qui réalisent quelque chose juste en bossant ensemble. Wikipédia, c'est faire confiance aux gens. Wikipédia, c'est une technique simple qui fonctionne et on laisse les utilisateurs faire le reste. Wikipédia, ce n'est pas un comité qui décide des actions du jour. Wikipédia, c'est tout le monde qui se prend en main. Wikipédia, c'est la pensée positive du mec qui décide d'améliorer ce qui ne lui convient pas plutôt que de râler. Wikipédia, c'est l'idée incroyable que, oui, au fond, tout le monde est un être humain qui peut participer comme les autres. Wikipédia, c'est la liberté, la vraie, pas le concept théorique qu'on définit en le rabiotant de tous côtés. C'est vrai, Wikipédia a des tonnes de problèmes : la qualité est inégale, on y trouve de vraies pures conneries, les engueulades y sont parfois à se flinguer. Et alors ? Vous croyez que personne n'a jamais remarqué ça et n'essaye de corriger le tir ? Vous pensez vraiment que la meilleure chose à faire, c'est de balancer tout le système à la poubelle et de faire strictement l'inverse ?

Pour moi, Wikipédia est la preuve que si on a les moyens technologiques adéquats, on peut parfaitement laisser tout le monde décider selon ses capacités et ses désirs. C'est une pensée rassurante : toute la hiérarchie pesante des mecs qui décident pour vous, ce n'est pas une fatalité. Venez vous frotter un peu au projet : quand on tentera de vous voler vos droits, quand des types en costard viendront vous dire qu'ils savent mieux que vous ce qui est bon et bien, vous saurez un peu mieux si vous pouvez être d'accord ou au contraire leur faire un bras d'honneur.

lundi 2 janvier 2012

2011 est mort, vive la mort

2011 s'est éteint seul, dans son appartement. L'enterrement s'est tenu dans le strict cercle familial. Ni fleurs, ni couronnes.

Rétrospectivement, je n'ai quasiment rien foutu sur Wikipédia en 2011. Oh, bien sûr, j'ai créé de la coquille vide à la pelle et merci Coyau de m'avoir parlé d'AutoWikiBrowser. Les gens en ont l'air satisfait, c'est chouette. (Bien sûr, je me prends des menaces de mort dès que je ponds plus de cent articles d'un coup, la dernière fois pas plus tard qu'hier ; bonne année. Mais c'est somme toute marginal.)

J'ai quand même l'impression que je n'ai pas été très impliqué, que tout s'est fait sans moi. Si j'avais été impliqué, c'est 100 000 articles que j'aurais rajoutés, pas 10 000. Et ils auraient été plus longs.

Non, rien à redire : 2011 fut une mauvaise année pour moi.