jeudi 12 juin 2008

Pontifions sur l'encyclopédisme

Une encyclopédie, c'est « un ouvrage qui fait le tour de toutes les connaissances humaines ou de tout un domaine de ces connaissances et les expose selon un ordre alphabétique ou thématique ». C'est le TLFI qui le dit, donc ça doit pas être trop éloigné de la réalité.

Pour un concepteur d'encylo papier, il y a deux problèmes : la place et la vente. La place, parce que ça en prend, les pages. La vente, parce qu'il faut bien gagner de la thune avec. Il faut donc mettre des infos sur un peu tout, pas trop sinon c'est trop gros, et rédiger le tout pour que le client accepte de payer pour ça. Résultat : faut faire un tri. Faut prendre les sujets suffisamment importants (pour que le lecteur en ait pour son argent) et laisser tomber ce qui n'est pas noble (sinon le lecteur s'estime floué). Pour le style, on va pas donner dans la structure expérimentale, mais plutôt dans l'exposé de classe.

L'encyclo papier, c'est donc un ensemble de volumes qui traitent consensuellement des sujets qu'on s'attend à trouver dans une encyclo papier. C'est tautologique, je l'admets.

Bon, si on veut faire différemment, on écrit le Quid : aucune rédaction et on empile les données comme une pie les objets brillants. Mais ça reste un marché de niche et personne n'ira prendre ça pour une encyclo papier.

Maintenant, Wikipédia. Dès le début, le but a été de produire une encyclopédie. Forcément, le modèle, c'était l'encyclo papier (y'avait rien d'autre). Au début, en: proclamait fièrement vouloir atteindre 100 000 articles et j'imagine que c'était un horizon indépassable. C'est toujours facile de se moquer après coup, et en 2001, personne n'avait dû vraiment se poser la question : on s'arrête où, au juste ? On crée les articles auquel tout le monde pense (les pays du monde, les grandes lignes de leur histoire, les auteurs classiques, ce genre de trucs) et on aboutit très vite en territoire inconnu puisque la contrainte matérielle (et financière) a sauté. Il ne doit pas falloir longtemps pour qu'on se mette à écrire à propos des trucs qui n'étaient pas mentionnés dans les encyclos papier. « Mais on ne va quand même pas créer un article pour chacune des communes françaises ? » Ben si.

D'où à mon sens le problème : confondre les sujets qui n'apparaissaient pas dans les encyclos papiers par manque de place ou par inadéquation avec les attentes du public ciblé (les jeux vidéo, la musique industrielle, la démographie des Samoa américaines, les arrondissements de Marseille) avec les sujets qui n'apparaissaient pas dans les encyclos papier parce qu'ils n'avaient rien à y foutre (par exemple, le chat du voisin*).

À mon sens, c'est un problème fondamental sur Wikipédia : il empêche d'utiliser le médium dans toutes ses capacités. Et il procède d'un blocage plus ou moins inconscient, d'un préjugé ancré par des décennies de pratique, donc difficile à passer outre.

Bon, il est tard, j'ai d'autres trucs à dire, mais je les dirai plus tard.

* Sauf si votre voisin est le Premier ministre anglais, bien sûr.

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