vendredi 25 juillet 2008

Knol

Donc, Knol est sorti. J'ai joué un peu avec et j'ai quelques maigres trucs à dire dessus.


Pour ce que j'en ai compris, le but de Google est de pouvoir retourner des knols sur un sujet quand on le recherche. J'imagine que l'intérêt pour Google est d'accroitre la visibilité de leurs publicités, voire même d'en placer lorsque la recherche est initiée chez un concurrent. Je ne me prononcerait pas sur le sujet, mais ça ne me parait pas idiot. J'ai entendu des critiques protester que ça permettrait à Google de se faire plus de fric ; outre l'absurdité du commentaire (évidemment que Google cherche à se faire plus de fric, mais ce n'est pas intrinsèquement une mauvaise chose et probablement sans importance pour nous, à moins de considérer bien sûr que tout argent corrompt), il me semble qu'on oublie que le service peut apporter quelque chose à ses utilisateurs. Bref.


Techniquement, Knol enfonce Wikipedia. Wikipedia, c'est l'esprit du web de 1991 avec les moyens de 1995. Knol, à côté, donne l'impression d'avoir été conçu au XXIe siècle, et pas au début de celui-ci. Rien à redire, donc. Après tout, de la part de Google, c'était la moindre de choses.


Je crois qu'il y a une incompréhension de ce qu'est Knol. Ce n'est pas à proprement parler une encyclopédie, et jamais présenté comme tel. C'est plutôt une plate-forme dédiée au savoir individuel, un peu comme il y a des plate-formes de blogs. Ici, qui veut écrire une page sur un sujet quelconque se voit fournir les outils adéquats.


Knol est nettement plus libéral que Wikipedia, et ça ne concerne pas que les sujets. S'il est possible d'écrire des knols sur (pratiquement) ce qu'on veut, sans souci de critères, d'admissibilité, de travail inédit ou de neutralité de point de vue, on peut également sélectionner trois niveaux d'édition collaborative : totalement ouverte (n'importe quel utilisateur enregistré peut alors modifier le knol), modérée (les modifications ne sont publiées qu'après accord) ou fermée (le plus restrictif). Trois types de licence : Creative Commons, Creative Commons non-commercial, et tous droits réservés. Il est également possible d'autoriser la pub, ou pas.


Knol permet de vérifier l'historique d'un article, un point que je craignais de ne pas retrouver. C'est à mon avis l'un des points forts de Wikipédia, et je suis content de voir que Google l'a intégré. Il semble toutefois qu'il y ait des différences subtiles qu'il faudrait creuser.


Dans Wikipédia, la sélection du contenu se fait par consensus. Knol ignore ce principe. Google a choisi de sélectionner les sujets à la manière web 2.0 : ce sont les lecteurs qui notent le contenu. Plusieurs knols distincts sont possible pour un même sujet, autorisant autant de point de vue à s'exprimer (ainsi que différentes formulations et mises en perspective). C'est un choix à la fois facile et ambitieux, et je suis satisfait que Google s'y colle : ça permettra de voir si c'est viable, et dans quelle proportion. À priori, il n'y a aucune raison qu'on ne puisse pas avoir, sur un sujet complexe, un moins bon traitement que sur Wikipédia, la multiplication des knols (notés, je le rappelle) pouvant remplir cet office.


Par contre, Knol sacrifie au mythe de l'auteur. Ce n'est pas parce que son auteur est identifié qu'un sujet est mieux traité. Les gens peuvent mal s'exprimer, se tromper, mentir, être de mauvaise foi, et toutes autres choses encore. Avoir un expert sous le coude ne change pas grand chose (ça déplace juste le problème sur la compétence de l'expert). Et Knol ne met pas en place un système de peer review suffisamment solide pour répondre à ce point. Les lecteurs auront probablement plus l'impression que les knols sont plus fiables que les articles de Wikipédia, mais ça restera une impression. Il ne le seront pas moins, certes, mais vraisemblablement pas plus. Et certainement pas tout le temps.


Tout knol est une île. Les liens internes de Wikipédia sont une vraie force. Knol ne possède pas de système équivalent. J'ignore si ça sera un problème.


Pour conclure, je pense que Knol est la première alternative crédible à Wikipedia à avoir jamais vu le jour. Comme on dit, l'avenir dira si le choix était bon. En tout cas, même sans concurrencer directement Wikipedia, Knol ne pourra s'étendre qu'en empiétant sur elle (le temps des contributeurs n'est pas extensible). Ou alors, Knol permettra de flanquer un coup de pied au derrière virtuel de Wikipedia, qui a bien besoin, je pense, d'un peu d'adrénaline. Knol me semble posséder un côté anti-paternaliste qui n'est pas pour me déplaire (chacun choisit ce qu'il estime le mieux comme sujet et comme façon de le rédiger, et tout le monde finit par donner l'opinion qu'il désire). Par contre, rédiger un knol tout seul, c'est dur. Oh, bon, on peut toujours commencer quelque part.

1 commentaire:

Anonymous a dit…

Retour d'expérience intéressant !

Cependant finalement ça n'aide pas vraiment pour clarifier le statut de knol par rapport à celui de Wikipédia, pour autant que celui-ci en ait un : encyclopédie ;). Knol, "n'est pas à proprement parler une encyclopédie", mais c'est la "première alternative crédible à Wikipédia". Il semble donc que la comparaison soit bien délicate.

J'observe aussi que tu n'as pas dit un mot sur le monolinguisme actuel (comparé ou pas à WP). Cela en rajoute à la difficulté de la comparaison pour les quelques non-anglophones subsistant de part ce monde.


Un Pilier du Bistro.