jeudi 23 septembre 2010

Prochaine étape : 220 !

Donc, le million.

Ce fut un peu longuet, mais on va finir par y arriver, à la millionième fiche sur la Wikipédia en français. Bien sûr, ça aura mis quatre ans de plus que sur en:, mais le résultat est là.

Maintenant, deux choses vont se passer.

La première : le millionième article ne sera pas assez bien. Pas digne d'une encyclopédie. Pas digne d'un projet culturel. Probablement ni fait, ni à faire. En plus, ça sera probablement une sale ébauche pourrie. (Pour info, le millionième sur en: était une gare. Même pas une gare connue, une simple gare de banlieue en Écosse. Et l'article initial était une sale ébauche.)

La seconde : désormais, le projet sera terminé, il n'y aura plus aucun sujet, on aura tout fini, tout éclusé, tout écrit et il faudra se concentrer sur l'existant. Faire passer le nombre d'AdQ de minuscule à risible, par exemple. Ou bien virer toutes ces fiches sans intérêt qui dénaturent le projet. Revenir au fondamentaux, quoi. (Évidemment, en: possède deux fr: et demi d'articles en plus, mais c'est pas vraiment des articles, donc ça compte pas.)

Bref, vous l'avez compris, le passage à sept chiffres va être l'occasion rêvée pour tous les pleureurs de pleurer encore plus. Alors, bien sûr, on pourrait se dire que c'est un putain de projet génial avec lequel on s'amuse trop bien, qu'on a foutu la pile à tous les détracteurs, que ça marche du feu de Dieu et qu'en plus on n'a toujours pas atteint les limites du bidule, mais ce serait probablement trop optimiste. Et l'optimisme, tout le monde vous le dira, c'est pour les abrutis, car tout est toujours perdu d'avance et si ce n'est pas parfait dès le début, ça ne sert à rien d'essayer.

Personnellement, je n'irai pas bouder mon plaisir. Je suis content que ce projet, dans lequel je me suis quand même investi depuis plus de six ans, continue à progresser.

Allez, puisqu'on y est, voici un de ces articles improbables qu'on ne peut trouver que sur Wikipédia : la boulangerie-patisserie Beaumarchais. Oui, c'est une simple boulangerie parisienne. Mais elle est inscrite aux monuments historiques. Pour en arriver à la création de l'article, il a fallu qu'un projet se monte, qu'on tâtonne pour trouver comment écrire sur des sujets de ce genre, qu'on se rende compte qu'on peut pondre des articles comme ça, que quelqu'un prenne une photo, éprouve l'envie d'en parler et se mette derrière son clavier. Une logistique complexe. Certes, ce n'est probablement pas l'article le plus important du monde : et alors ?

jeudi 2 septembre 2010

Fight the Powah![who?]

J'étais en train de lire un texte d'OWNI sur l'absence des intellos français sur Internet (enfin, plus exactement, leur refus d'être présent sur Internet). Bon, OK, mais qui se préoccupe encore des intellectuels français parisiens germano-pratins (j'ai plus d'adjectif pertinent, Saint-Germain-des-Près est redevenu un quartier ordinaire de Paris depuis des décennies) ?

J'imagine que ça doit être assez difficile à concevoir pour certains de mes lecteurs, mais je vis dans un monde totalement désintellectualisé, d'où les institutions sont absentes. Ici, l'État est une abstraction se réduisant à ses interfaces administratives, les gouvernements ont autant impact que si je vivais au bord du désert des Tartares et les discours tenus par les personnes autorisées me parlent autant que ceux des Tubular Brainers dans l'Arche de Captain Blood[1].

Dans un texte cité par le billet d'OWNI, j'ai trouvé la citation suivante, que je trouve assez descriptive : « La culture numérique est née d’ingénieurs surdoués mais plutôt rustauds (accessoirement : n'ayant pas lu La Princesse de Clèves, ils sont l'incarnation parfaite de cette middle class méprisée par nos intellectuels). »

Je me suis déjà exprimé il y a quelques mois sur ma propre rusticité et ma propre condition de fils de middle class sans passé ni culture. Il se trouve que je n'ai pas lu La Princesse de Clèves (par pur hasard, j'ai lu d'autres bouquins ; et puis ma grande sœur m'avait dit que c'était super chiant) et que j'ai un diplôme d'ingénieur (qui ne m'a d'ailleurs jamais vraiment servi). J'ai grandi dans des classes de fils et filles d'enseignants intégralement dédiés à l'entrée dans des Grandes Écoles. Probable que mon comportement adulte est une réaction au sentiment d'aliénation que je n'ai pas manqué d'éprouver à l'adolescence.

Toujours est-il que le discours intellectuel français standard me passe complètement au-dessus de la tête. Certes, il m'agace un peu (qui ne serait pas agacé quand on lui fait comprendre qu'il doit faire partie d'une culture tout en sachant qu'il en sera éternellement exclu ?[2]), mais il est quand même bien bénin. Je sais bien que la Vraie Vie n'est pas là. Que quand la France disparaitra complètement de la pensée mondiale[3], ça ne sera pas bien important, que la France fut juste un pion brièvement promu comme reine avant d'être retiré de l'échiquier. Tout ceci ne changera rien pour moi, ni pour les dizaines de millions de mes concitoyens.

La seule chose que je sais, c'est que tout le monde aime votre culture, mais que personne n'ira jamais la défendre à votre place. Ce n'est même pas une question de protection, d'exception culturelle, d'impérialisme ou n'importe quoi. Bref, l'hystérie anti-Internet, ce n'est pas seulement à côté de la plaque, c'est également le meilleur moyen pour disparaitre totalement. Peut-être est-ce l'objectif ? Le désir de mort n'est pas quelque chose d'abstrait.

De mon côté, Wikipédia, c'est un peu ma façon de faire vivre ma culture à moi (une culture hétéroclite, qui contient même de vrais morceaux de Grande Culture). Ce n'est pas la seule, mais c'est le sujet de mon blog, donc je ne parlerai que de ça. Ça me procure également le sentiment gratifiant de m'opposer à l'establishment sans avoir à lancer de pavés. L'affreuse vérité, c'est que je ne me soucie pas de promouvoir la Culture ou la Mémoire ou je ne sais quel autre grand mot avec une majuscule au début. Si je fight the powah, c'est un sous-produit, une conséquence annexe, un cadeau bonus, un truc cool en plus.

Malgré tout ça, malgré mon passé, malgré mes origines, malgré mon environnement, je n'ai aucune justification particulière pour contribuer à Wikipédia, mis à part que c'est fun. Il parait que c'est mal et que c'est un exemple de plus de la démission politique des personnes de mon âge. Euh, certes, et alors ?

C'était un billet de blog complètement décousu, écrit sur une dizaine d'heures au milieu de plein d'autres choses. La seule chose que je voulais dire, c'est : je n'intellectualise pas Wikipédia. Voilà.


  1. Félicitations à ceux qui pigent la référence.
  2. Et je suis très très loin d'être le plus exclu dans l'histoire.
  3. En supposant que ce n'est pas déjà le cas, bien sûr.